[OS] Speed-dating ^

En entrant dans le salon de thé qui servait aujourd’hui de lieu de réception pour le speed-dating, Jane et Lisbon sentirent les regards converger vers eux.

L’organisatrice s’approcha d’eux, un sourire mielleux plaqué sur son visage siliconé.

- Bonjour, pourriez-vous me donner vos noms s’il vous plaît, afin que l’on sache qui est absent ?

Lisbon lui donna le sien, et Jane, quant à lui, lui offrit son plus faux sourire et désignant Lisbon, il dit :

- J’accompagne simplement Mademoiselle.

- Très bien Monsieur, dans ce cas, je vous demanderais de bien vouloir passer de ce côté pendant que j’accompagne Madame près des autres candidates au bonheur.

Lisbon grimaça. "Candidates au bonheur ?" Y’en a vraiment qui n’ont peur de rien …

Jane s’exécuta et arrivé à destination, il parcourut rapidement l’assemblée des yeux : 11 hommes, pour 11 femmes. A chaque pied sa chaussure ! pensa-t-il ironiquement. Il s’attarda sur quelques visages : un homme, la soixantaine, divorcé depuis peu si on en juge la trace blanche sur son annulaire gauche « pas prêt pour une nouvelle aventure, il veut juste se persuader que son mariage est bel et bien fini, mais il est encore amoureux de sa femme » ; une femme, jeune, jolie, définitivement pas du genre à fréquenter ce genre d’endroits « trop timide pour draguer des mecs dans des bars, c’est la blonde à côté d’elle qui l’a traîné ici. Probablement sa sœur » ; une mamie coquette qui se laissait conter fleurette par un inconnu avec fleur à la boutonnière « et bien en voilà deux qui n’ont pas attendu le top départ pour se trouver … ».

Mais il fut distrait de son observation par le son d’une clochette, qui signifiait sans nul doute le début des réjouissances. Un sourire un brin diabolique apparu sur le visage de Jane, qui tourna aussitôt son visage vers Lisbon, pour voir comment elle se débrouillait face au premier candidat. Oh ! Le papi. Il fait contre mauvaise fortune bon cœur mais ses pensées sont toutes entières tournées vers la mamie à gauche de Lisbon. Eux, ils se sont vraiment bien trouvé … songea Jane. Déjà fini. C’est vraiment court en fait 3 minutes ! Bon allez Patrick, bouge-toi un peu, trouve le tueur. Il s’attela aussitôt à la tâche mais fut distrait presque tout de suite par le joli rire de Lisbon. Jane la regarda à nouveau. Elle semblait être sous le charme de son nouveau vis-à-vis. Jane, étrangement agacé, eut envie d’hurler à Lisbon que son prétendant était gay et ne voulait simplement pas se l’avouer donc il draguait des filles à tour de bras sans pouvoir cependant s’empêcher de mater discrètement les mecs, comme le Musclor en face de Mamie. Allez, laisse tomber Jane, elle a le droit de s’amuser un peu ! Remets-toi au boulot !

Mais ses pensées semblaient comme court-circuitées par le rire de Lisbon. Jane observa l’homme encore une fois, avec une étrange envie de lui faire rentrer son baratin dans la gorge. Bon Dieu, mais qu’est-ce qui te prend ? Vas savoir elle ne joue peut-être que son rôle … oui c’est sûrement ça, un rôle … Ah ! Enfin fini ! Tiens ! Mr Muscle ! En aucun cas, le genre de Lisbon … Rassuré, Jane reprit son observation méthodique des faciès présents, jusqu’à être à nouveau coupé dans son élan par la posture séductrice que Lisbon avait inconsciemment adopté face à ce nouvel inconnu. Et lorsqu’il prit la main de Lisbon, Jane ressentit malgré lui une bouffée de jalousie face à ce bellâtre en pleine parade nuptiale. Heureusement pour lui, la clochette retentit une fois de plus pour signifier la fin de l’entrevue, et par là même la fin des rencontres. Mais l’Inconnu ne semblait pas vouloir lâcher la main de Lisbon et se penchait même vers elle, alors qu’elle inclinait la tête en souriant pour mieux comprendre ce qu’il lui susurrait à l’oreille. Un toussotement fort peu discret vînt interrompre ce doux moment. Lisbon, fronçant les sourcils, se retourna et vit son consultant arborer un grand sourire. L’air de rien, il dit à l’Inconnu que l’organisatrice le cherchait. Il s’excusa auprès de Lisbon et s’éclipsa, pendant qu’elle morigénait à mi-voix son consultant :

- Vous étiez obligé de nous interrompre ?

- L’organisatrice le cherchait …

- Dans ce cas, pourquoi est-ce qu’elle est occupée avec la brune à frisettes là bas ?

L’imagination pourtant débordante de Jane lui fit défaut sur le moment, et il répliqua faiblement :

- Mais il vous draguait ouvertement !

- C’est un speed-dating, Jane ! Les gens viennent pour draguer. Et se faire draguer aussi, rajouta-t-elle en rosissant.

Son consultant ouvrit la bouche pour répondre quelque chose mais comme rien ne venait, il la referma, et la rouvrit pour confier à sa patronne le nom du tueur. Elle lorgna discrètement vers lui, puis prenant Jane par le bras, elle décréta qu’il était temps de partir, qu’il fallait qu’elle rentre au CBI pour se renseigner sur lui. Alors qu’ils s’apprêtaient à franchir la porte, un bras retint Lisbon. L’Inconnu. Encore lui.

- Je … Euh … Enfin, voilà, je … appelez-moi, si le cœur vous en dit, déclara-t-il à Lisbon en lui glissant un papier dans la main.

- Je n’y manquerais pas, répondit-elle en rougissant.

Jane, lui, ne maîtrisa pas la vague de déception qui s’abattit à cet instant sur ces épaules …