L'étrange Noel de Mister Jane (Romance/Enquête) Ch 18 up ! ^

Pendant ce temps dans le salon, une autre bougie s'éteignit.

La famille Mc Lean était définitivement morte et enterrée.

Il n'en restait plus que sept.

Bientôt il n'en restera plus aucun… ou presque.

Lisbon en avait officiellement marre. Ses mains et ses pieds la brûlaient comme pas possible, et bien qu'elle ait dormi comme un loir (merci Jane), le réveil n'était pas particulièrement doux. Loin de là. Comment Kristina Frye pouvait avoir une voix si stridente, sérieusement.

De plus sans vouloir sauter sur les conclusions une évidence s'imposait : Kristina Frye était la suspecte toute désignée. La pièce fermée, deux personnes dedans, l'une morte et l'autre vivante. Comment avait elle pu ne pas comprendre ? Un meurtre déguisé en suicide ? Un véritable suicide ?

Mais la fenêtre ouverte. Pourquoi ? En examinant l'extérieur, on pouvait se demander comment quelqu'un pouvait entrer dans cette tempête. Enfin le mot. Le meurtrier, ou à défaut la personne ayant assisté au suicide, aurait-il voulu grimper par la fenêtre et les tuer ? Avait il glisser le mot sous la porte mais dans ce cas pourquoi Mc Lean aurait ouvert la fenêtre ?

Trop de questions, peu de réponses et pas assez de temps. Tout allait trop vite. Trop d'indice pas assez d'élément il fallait impérativement tout remettre à plat et vite sinon elle ne donnait pas chez de sa vie ni de celle de Jane.

Jane, qui d'ailleurs la regardait fixement adossé à la porte tandis que le shérif et ses adjoints regardait Frye avec des yeux scrutateurs et attendaient visiblement qu'elle prenne les choses en mains. Génial.

Fatiguée de nouveau, elle répondit à tout le monde de descendre dans le salon tandis qu'elle examinait la scène de crime. Ils devaient veiller sur Frye et ensuite elle descendrait l'interroger. Jane ne disait toujours rien de contentant de la fixer. Se rendait il compte que ça la troublait plus qu'autre chose ou quoi ?

D'autant plus que tout ceci lui rappelait de trop nombreux souvenirs, trop noirs, trop froids, trop effrayants… Comme si tout était mis en scène pour la détruire.

Flashback :

« Dis grande sœur, il est où papa ? »

Seul le froid mordant de l'hiver répondit au plus jeune frère de Lisbon. Elle ne savait pas comment lui dire que son père ne reviendrait jamais. Elle avait apelé les secours mais cette fois c'était trop tard. Elle savait instinctivement tout comme l'ainé des frères l'avait su au moment ou il la vit penché sur lui.

Son premier cadavre.

Elle avait résolu cette enquête avec brio et détachement – un détachement apparent - mais qui faisait surgir des émotions violentes, qui telle une lame chauffée à blanc contrastait avec la fenêtre grande ouverte, les cadavres de bouteilles embuées et le corps figé de son père.

Elle connaissait le motif : la mort de sa femme qui l'avait conduit à cette vie de débauche de chômage et à son alcoolisme chronique. Il ne supportait plus la vie, mais surtout plus elle. La raison de la mort de sa mère, son portrait vivant. Et son frère avait compris dans les bribes de conversation perverties par l'alcool de son père qu'elle était l'une des choses qui avait causé ce drame.

L'ambulance arriva. La police et bien sur son cortège d'assistante sociale et autres, leur commisération forcée, et le fait de ne pas savoir quoi faire de toute cette famille. Quatre frères et sœurs n'iront pas dans un même foyer.

Voila pourquoi elle ne voulait pas que son père meurt, mais même ça il s'en contrefichait. Il avait brisé sa famille, sa vie et leur avenir.

Plus jamais personne ne ferait ça sans avoir à faire à elle. Elle se le jurait.

Fin du flashback.

« Lisbon ? Ça va ? »

« Oui je réfléchissais. Et toi ? tu as découvert quelque chose d'intéressant ? »

L'art d'esquiver. Son nouveau crédo. Mais elle avait un crime à résoudre et penser à Jane et à sa petite personne ne l'aiderait en rien elle le savait.

Jane la regarda encore quelque seconde, puis se pencha sur la scène de crime. De même que Lisbon, le suicide semblait être de prime abord la solution la plus logique, le mot et la manière de s'y prendre concordant. Cependant, la fenêtre ouverte et le fait que Kristina Frye soit dans la pièce au même moment et sans s'en rendre compte pouvait montrer qu'autre chose avait pu se passer.

Aucun autre indice, sur la tenue du corps, ses chaussures ou vêtements, jusqu'à son attitude ne montrait de résistance. Sur son visage ne s'étalait que l'ombre d'un père et d'un mari à qui l'on vient de prendre les deux raisons qui forment pour lui sa raison de vivre.

Comment être objectif en sachant que lui-même s'était fait interner pour ne pas agir ainsi ? Mais comment ce père ne pouvait pas aussi vouloir venger ses proches ? Voila ce qui ne collait pas. Mc Lean était désespéré mais son regard avant de disparaître avec Kristina indiquait clairement qu'il aurait entrainé inéluctablement le bourreau de sa famille avec lui.

« Lisbon, il ne s'est pas suicidé. Tout à l'heure lorsque nous sommes revenus, il s'inquiétait pour autrui, nous a soigné et même si la tristesse était marquée, il avait de la détermination dans le regard. Il ne se serait pas pendu tout de suite. Non il aurait tué l'assassin avant. »

Lisbon soupira et dut poser la question qu'elle regrettait déjà, mais n'ayant pas le choix …

« Es tu sur que tu parles de la victime …et non de toi ? »

S'il fut choqué par cette phrase il n'en montra aucun signe. Elle soupira, attendit sa réponde qui ne venait pas.

Flashback

« M. Jane je suis désolé pour votre fille et votre femme, mais je dois vous demander de bien vouloir répondre à quelques questions… »

« Oui inspecteur je suis à vous dans deux minutes je dois aller me rafraichir avant, je ne … me sens pas très bien… Je suis… »

« Je vous en prie monsieur ».

Il n'était pas considéré comme suspect étant donné qu'il revenait d'un voyage d'affaire et que la mort remontait à douze heures. De ce fait l'inspecteur ne jugea pas utile de le pousser plus.

Jane se rendit dans la salle de bain ou il se bloqua devant le miroir. Il se passa de l'eau sur le visage, les larmes roulant sur ses joues se confondant maintenant avec les gouttelettes ruisselantes. Loin de l'apaiser, il se souvint des balades avec sa fille tandis qu'il pleuvait et qu'ils riaient tous les deux sous leur parapluie. C'était le jour avant qu'il parte.

Et aujourd'hui, il se retrouvait seul, à la fois victime de la folie meurtrière d'un psychopathe et coupable d'être la raison du double meurtre. Le smiley en était la preuve parfaite. Des yeux tombant qui semblait pleurer des larmes de sang tandis qu'un sourire à la fois résigné et ironique flottant sur leur lèvre rougit.

Ce même smiley qui devint son masque, les yeux résignés et presque fous et ce faux sourire : le sourire de la vengeance.

Fin du Flashback

« Oui j'en suis sur. Jamais il ne se serait donné la mort maintenant. Nous devons parlé aux autres malgré le mot ce n'est pas un suicide. »

Lisbon le regardait pensivement, cherchant à l'analyser. L'enquête n'était pas facile pour lui non plus. La femme et la fille morte et le mari tué. Quelle belle ironie du sort.

« OK. Je te suis. Mais avant il va falloir refaire mes bandages et me mettre de la crème. Si ça ne guérit pas j'aurais du mal à me servir de mon flingue et avec les comiques qui servent de flics en bas je ne donne pas cher de notre vie si on nous attaque. »

En deux mots Lisbon avait réussi à détendre l'atmosphère trop lourde et trop pesante de la pièce. Ils sortirent tous les deux pour retourner à leur chambre tandis que Lisbon fermait de nouveau la porte.

Décidemment, une enquête simple se révélait cacher une affaire qui pourrait leur valoir à tous les deux les pires séquelles psychologiques qui soient et chacun se demandait s'il pourrait les supporter.

Chambre de Jane et Lisbon aux alentours de 6 heures trente du matin, 21 décembre, Chalet Heavencrest.

De retour dans leur chambre, Jane appliqua la fameuse crème sur les mains et les pieds de Lisbon non sans un léger plaisir, vite terni cependant par ce qui les attendait en bas. Tandis qu'elle fixait elle-même ces bandages aux pieds, Jane se permit une légère toilette ainsi qu'un rasage tandis que Lisbon s'habillait convenablement.

Elle n'attendait Jane que quelques minutes regardant le feu qu'il s'éteignait doucement dans l'âtre, provoquant le rougeoiment de ses joues et refletant les mèches brunes dans ses cheveux.

C'est ainsi que la trouva Jane en sortant de la salle de bain, fragile, belle mais forte et au bord des larmes. Le contraste vivant Teresa Lisbon. Il sourit, s'agenouilla et la prit dans ses bras.

Elle ne le repoussa pas. Il ne fit que dire une phrase magique à laquelle se raccrocha Lisbon de toutes ses forces.

« On s'en sortira. Je te promets qu'on s'en sortira. »

Dieu qu'elle aimait cet homme. Mais serait-ce suffisant ?

Tandis qu'ils descendaient finalement les marches en silence, les hommes et le shérif ainsi que Kristina contemplaient dans un silence religieux les bougies.

Trois ne brillaient plus. Et un souffle d'air les narguait, faisant vaciller la flamme des bougies restantes et une question demeurait en suspend.

Qui serait le prochain sur la liste ?

Sur ce voici la suite.

Tandis qu'ils descendaient finalement les marches en silence, les hommes et le shérif ainsi que Kristina contemplaient dans un silence religieux les bougies.

Trois ne brillaient plus. Et un souffle d'air les narguait, faisant vaciller la flamme des bougies restantes et une question demeurait en suspend.

Qui serait le prochain sur la liste ?

Le salon ressemblait plus à une veillée funèbre qu'à une veillée de Noel et pour cause. Trois ou peut être quatre mort, tous dans des circonstances tragiques et le ou les tueurs se cachaient probablement parmi eux.

Jane ne pouvait que se remémorer ces instants où il avait vu cette petite fille, le visage désertée par la vie, blanche, innocente, sentant cette fragrance si spéciale que les jeunes filles aiment porter. La fraise. Ces dernières heures sur cette terre avait du être un cauchemar. Il se détestait de n'avoir rien dit pour défendre le projet de la mère de la laisser toute seule. Car lui aussi avait laisser sa fille et sa femme seule.

Il se perdit dans la contemplation presque maladive des bougies, à l'instar des deux policiers restants, les autres, sur les ordres de Lisbon, étant parti faire un brin de toilette.

C'est alors qu'il remarqua un détail sur l'une d'elle. Celle qu'il fixait était celle de Lisbon, dont la faille vacillait dangereusement, plus exposée à un courant d'air sans nul doute.

Il se leva sous le regard interrogateur de sa partenaire, ne prêtant aucune attention à la Kristina prostrée dans le fauteuil, ou aux deux policiers ramenant le café qu'il venait de préparer.

La conversation entamée entre Kristina et Lisbon ne lui apparaissait que comme enveloppée de brouillard. Le vent mugissait toujours autant et personne ne savait combien de temps le générateur fournirait de l'électricité. La neige parfois se détachait du toit et avec un bruit macabre s'échouait au sol, ombre passant devant les fenêtres que le peu de lumière parvenant à passer aux travers des nuages sombres, jouant avec leurs nerfs, tel un fantôme passant pour les happer vers les limbes…

Des fantômes avides.

« Kristina ce ne sont pas des fantômes. Il y a quelqu'un qui tue ces personnes et vous devez comprendre que nous vous soupçonnons. Mc Lean était enfermé avec vous dans la chambre. Et Jane, comme moi, pensons qu'il a été tué. Vous devez nous dire ce qu'il s'est passé. »

Kristina soupira. Si seulement elle en avait la moindre idée. Ici il n'y avait que la mort, des fantômes qui se nourrissaient de leur chair pourrissante sous le poids de leur pêcher. Elle allait y passer. D'une manière ou d'une autre.

Lisbon soupira. Une migraine commençait à poindre et elle voyait cette femme complètement renfermée sur elle-même. Elle savait quelque chose mais ne voulait rien dire. Elle devait insister, après seulement elle se servirait un café, maigre récompense l'aidant à tenir le coup.

Kristina se saisit en revanche de l'une des tasses que lui proposait l'un des adjoints du shérif. Elle n'en but qu'une gorgée, la tasse brulante lui réchauffant progressivement les mains, la réveillant progressivement de sa semi léthargie.

« Kristina, racontez moi ce dont vous vous souvenez. Commençons par la. »

« Je … Je suis montée me coucher dans la chambre avec Mc Lean. Il m'a dit de profiter en premier de la salle de bain, ce que j'ai fait. J'y suis restée environ quinze minutes je pense. J'ai ensuite défait ma valise, ce dont j'avais besoin et j'ai, j'ai pris le verre d'eau posé sur la table j'avais soif. »

« Kristina, ce verre d'eau : vous l'avez vu quand vous êtes entrée dans la chambre oui ou non ? Réfléchissez : avait-il un aspect étrange, un goût suspect ? Que faisait Mc Lean ? »

« Je… Je ne suis plus très sure… Je crois que Mc Lean était comme malade, il semblait pâle et bizarre mais il venait de perdre sa femme et sa fille. Il maugréait tout le temps que tout était de sa faute… et je crois qu'il s'est enfermé dans la salle de bain. »

« Savez-vous de qui il parlait ? »

« Non, je ne pense pas qu'il s'agissait de lui mais je n'en suis pas sure. Je l'entendais bouger dans la salle de bain mais je ne m'en souviens pas s'il en ait ressorti ou non. Je crois que je me suis endormie rapidement. Pourtant je ne dors pas rapidement… »

« Et ensuite ? »

« Je me suis réveillée en sursaut. Un grand bruit m'a tiré de mon sommeil et j'avais froid, je grelottais. Je sentais le vent s'infiltrer sous mes couvertures mais j'étais comme prisonnière de mon sommeil … vous comprenez. Je ne réagissais quasiment pas, et finalement j'ai réussi à me lever. Et un moment la lune a transpercé les nuages et je l'ai vu… Il … oh mon dieu… Il était suspendu dans le vide, et son corps… »

« C'est bon détendez vous Kristina. Avez-vous entendu quelque chose dans le couloir ? Etes vous sur que la porte était fermée avant de vous couchez ? »

« J'en sais rien ! C'était Mc Lean qui devait vérifier … »

« Très bien cela suffira. Buvez votre thé. »

Si la porte n'était pas fermée et que Mc Lean avait potentiellement endormi Kristina en la droguant avec quelque chose dans son verre d'eau, alors le meurtrier avait non seulement toute possibilité de tuer Mc Lean, mais il disposait en plus de la clé de cette chambre. Qui donnait un accès sur toutes les autres chambres. Lisbon se souvenait en effet que toutes les clés sur le trousseau de cet homme ouvrait tous, jusqu'à la chambre froide, le garde manger ou encore les garages.

Moralité le tueur se baladait dans la nature avec non seulement tout ce qu'il fallait pour les tuer mais sans laisser aucun indice. Tout était parfaitement programmé, organisé, parfois même jusqu'à leur réaction.

L'avis de Jane lui aurait été d'un grand secours mais il était absorbé par les bougies. Les souvenirs du passé devait être lourd, elle lui laissait finalement le temps de récupérer un peu.

Les deux autres adjoints revenus entre temps discutaient de l'affaire et des vivres restants dans la cuisine. La tempête ayant repris de plus belle, même si le jour devait être levé maintenant, constata Lisbon, la lumière serait réduite au minimum, et les possibilités de rejoindre la vallée nulle.

L'un des deux adjoints ayant finalement réussi à faire du café lui tendit une tasse qu'elle eut toute la difficulté du monde à tenir dans ses mains raides, encore rouges et boursoufflées sous ses bandages.

Alors qu'elle prenait la première gorgée de son breuvage bienfaiteur, un bruit émanant de Kristina, la figea dans son élan. Elle semblait avoir avalé de travers.

« Excusez moi, mon thé a un léger gout amer mais tout va bien, ce n'est rien j'ai juste été surprise.»

Lisbon ne fait aucune remarque spécifique mais elle regarda tout de même Kristina Frye du coin de l'œil. Elle semblait assez agitée alors qu'elle se maîtrisait tout le temps.

Pendant ce temps, Jane examinait le sapin de Noel, et les fameuses bougies. Il finit par se saisir de l'une d'elle. Celle de Sarah, plus précisément. Il la contempla un instant puis la retourna.

Une terreur glaciale et une colère sans nom vinrent souffler sur lui leur rage et leur peur.

Dessus un smiley rouge le contemplait. Le sang de Sarah ? Il n'en avait aucune idée. Mais il ne laisserait rien paraître de sa découverte. Pas maintenant. Il ne dirait rien à personne et surtout pas à Lisbon. Sa vengeance et son idée de revanche toujours présente, il garderait ça pour lui.

S'assurant du coin de l'œil que personne ne l'avait vu, il reposa l'air de rien tranquillement la bougie faisant maintenant mine de s'intéresser aux cadeaux.

Là aussi une autre découverte le frappa. Chacun des cadeaux portaient le nom des dix personnes présentes, mortes ou vives, dans le chalet.

Maintenant tout était clair net et précis. Il s'était fait piégé comme des débutants et aucun d'eux ne semblaient partis pour en sortir indemne.

Encore un plan de John Le Rouge pour les éliminer. Mais cette fois il ne laisserait pas passer sa chance.

Tandis qu'il se penchait pour ramasser l'un des dix paquets cadeaux présents à ses pieds, Kristina Frye se mit à tousser plus fortement, elle paraissait particulièrement agitée, à tel point que les policiers prirent sur eux de la maintenir tandis que Lisbon allait chercher une chaise et le shérif de la corde.

Elle délirait littéralement :

« Il est lààààààà ! Vous ne le voyez pas mais il vous regarde… Ses yeux rouges comme le sang mais vous ne comprenez rien ….. Il va tous nous tuer …. »

Elle pleurait et se débâtait comme une hystérique ses yeux injectés de sang, cherchant à griffer les personnes autour d'elle.

Une nouvelle fois, il avait frappé.

Dans un timing prodigieux, John Le Rouge avait à sa manière encore une fois bâillonné l'une des victimes.

Encore en vie mais pris au piège dans un esprit complètement ravagé par la folie, il semblerait que Kristina Frye vivent ses dernières heures dans une agonie pire que la mort.

Lisbon croisa le regard de Jane tandis que la malade, l'écume aux lèvres semblaient se calmer d'un rire hystérique.

Chacun d'eux se retrouvait pris au piège de ses propres démons.

Le shérif lança alors une phrase que jamais les acteurs de la pièce n'oublieront de leur vivant :

« Quiconque lutte contre des monstres devrait prendre garde, dans le combat, à ne pas devenir monstre lui-même. Et quant à celui qui scrute le fond de l'abysse, l'abysse le scrute à son tour…. Je crois que notre coupable est devenue un monstre non ? »

Restait à savoir de qui il parlait…

Chalet de Heavencrest, 21 décembre, aux alentours de midi, salon

« Vous connaissez peut-être énormément de choses d'une personne - toutes mauvaises. Mais il y a peut-être une seule chose que vous ignorez à son sujet, qui changerait complètement votre opinion si vous la connaissiez. »

La connaissance. Une notion vaste, un concept étonnant, étrange. Mais certainement le plus précieux à bien y regarder. Le pouvoir s’acquiert par elle.

Et Jane n’avait aucune autre solution que de la conquérir. Cette connaissance qui pourrait perdre son ennemi, cette petite faille, si infime soit-elle qui pourrait faire toute la différence. Mais cela impliquait une idée effrayante, telle une ombre prête à surgir et à se repaitre de toute humanité qui pourrait vous rester. Oui, car se rapprocher impliquerait comprendre, ressentir, toucher cette absence de compassion.
En clair, devenir tout ce que l’on refuse dans notre clairvoyance de devenir : le monstre que l’on pourchasse.

Pourtant il était résolu, avait fait ce choix. Dans un sens peut être comprenait-il mieux son ennemi qu’il ne voulait le laisser paraître. A la fois semblable et différent. Si proche et si distant.
Une offrande entre ces mains. Un paquet destiné à une petite fille. Si jolie, si innocente.
S’asseyant dans un coin de la pièce, presque au pied du sapin il contemplait ce présent joliment emballé. Rose bien sur. Tandis que tout le monde regardait Kristina à présent plonger dans une léthargie profonde, il tirait sur le nœud, qui se détacha en douceur.

La boîte était dès lors facile d’accès. Il fallait juste soulever le petit couvercle.

Prenant une inspiration profonde, l’anxiété se lisant sur son visage aux traits tendus et aux yeux perdus, Jane ouvrit lentement le petit coffret. Une musique douce se répandit autour de lui.
Une boite à musique. Ceci pourrait paraître anodin. Un cadeau de noël des plus banals mais pas celle-ci, pas cette musique, pas cette danseuse.

Lâchant en un instant la boite comme si elle l’avait brûlé, Jane s’enfuit en dehors de la pièce laissant derrière lui une assistance choquée par ce comportement imprévisible et surtout si peu conforme à l’image que tous s’étaient forgée plus ou moins rapidement de l’homme.

Chalet de Heavencrest, 21 décembre, 14 heures, cuisine

Lisbon savait parfaitement que si Jane voulait rester seul, il y parviendrait aisément même dans un chalet reculé en pleine tempête. Alors pour une fois, elle lui accorda le luxe de reprendre ses esprits tandis qu’elle-même tentait de comprendre sa réaction et ce qui lui cachait.

De toute façon, au nom de sa sacrosainte manie de « ne-pas-vouloir-mettre-ceux-qu’il-aime-en-danger », il la repousserait. Elle ne se voyait pas non plus laisser trop de suspects potentiels ensemble dans une même pièce, on ne sait jamais. Trop de morts.

Bref, elle s’accordait ce loisir distrayant tout en faisant la cuisine. Elle avait découvert avec surprise et bonheur que l’un des hommes du shérif savait faire une cuisine mangeable et lui donnait un coup de main, surveillant les ingrédients incorporés.
En effet, le fait que Kristina est été empoisonnée n’était pas un doute pour elle. Maintenant le thé étant resté à la portée de tout à chacun, tout le monde pourrait souffrir des mêmes effets. Bref peu d’indices et un véritable casse tête chinois à démêler.

Tandis qu’elle tentait vainement de prendre sa fourchette convenablement et de porter de la nourriture à sa bouche, le shérif revint avec le cadeau de Sarah, que Lisbon lui avait demandé d’aller chercher.

« Agent Lisbon, voilà. Je ne vois pas pourquoi votre collègue s’est enfui pour ça. Ce n’est qu’une banale boite à musique. »

Une banale boite à musique. Lisbon bloqua sur cette phrase.
Lisbon se revoyait devant Minnelli, le jour même ou elle apprenait que Jane apparaissait dans sa vie, reposant le dossier devant elle.
John Le Rouge n’avait rien pris excepté une chose. Une boite à musique. Selon le légiste, la petite fille la serrait dans sa main. C’est Jane qui avait compris. Le cadeau d’anniversaire des huit ans de Charlotte.

« Ce n’est pas une boite à musique ordinaire. C’est celle que John Le Rouge a … pris à la fille de Jane … quand il a tué sa femme et sa fille. »

Un silence de mort, entrecoupé par le vent et le bruit de la cafetière s’installa dans la cuisine. Ce fut l’un des adjoints, Bill McCormack, qui sortit en premier du mutisme installé.

« Vous… Non attendez. Vous voulez dire que celui qui tue tout le monde serait en réalité ce psychopathe… »

« Oui en effet. »

Ce furent les seuls mots de Lisbon. Elle laissa digérer la nouvelle aux autres occupants de la pièce tandis qu’elle regardait la boite à musique. Elle l’ouvrit tranquillement laissant la musique se rependre au milieu de la cuisine.

Kristina se mit à fredonner la chanson en rythme :

« Hush, little baby, don't say a word. Papa's gonna buy you a mockingbird And if that mockingbird won't sing, Papa's gonna buy you a diamond ring.”

Chacun selon son degré d’horreur imagina sans aucune peine l’effet sur cet homme. Le shérif s’effondra sur sa chaise, les autres adjoints, Bill, Joe et Vince ne firent plus aucun commentaire.

Lisbon contemplait d’un œil hagard et choqué la boite à musique tandis que la danseuse tournait inlassablement.
Elle comprenait toutes les implications de cette boite. John Le Rouge avait tout prémédité. Jane devait le savoir et bien sur n’avait rien dit. Mais voila le cadeau avait tout fait volé en éclat. Et Jane restait muet car il savait qu’il était coupable de les avoir tous entrainé et surtout elle, dans ce bourbier.

Finalement le shérif se permit de prendre la boite à musique et de la faire taire. Kristina s’arrêta également et ne réagit plus.

« Bien que fait-on ? On décide d’attendre la mort ou on se bouge ? »

Lisbon soupira.

« Il n’est pas question que je meurs ici et on va tout faire pour que plus personne ne s’amuse à remplir la chambre froide d’accord ?! »

C’est alors que le shérif explosa :

« Ecoutez Lisbon j’en ai marre maintenant. Vous vous pointez ici vous nous aidez dans cette foutue enquête, et je me retrouve coincé ici dans cette merde avec vous ! Alors maintenant, Je prends la direction des opérations ! je ne veux pas mourir à cause d’un connard qui s’amuse à poursuivre la paire de voyant ambulant !!!!!!! »

Lisbon se leva et malgré la douleur et le choc répondit d’un dur et clair au shérif :

« C’est vous qui allez m’écouter, Shérif Johnson. JE suis VOTRE supérieure, la personne peut être la plus qualifiée pour enquêter sur ces meurtres et aux dernières nouvelles, VOUS nous avez appelé donc VOUS êtes suspect de même que vos hommes ; alors vous allez vous calmer et on va tous finir de manger avant de mettre un plan d’action au point. »

« Non Lisbon je ne suis PAS d’accord. On est quatre et sans votre Jane vous êtes seule. Donc JE prends le commandement. »

Lisbon vit une lueur de folie dans ses yeux. En ce moment elle aurait préféré affronter John Le Rouge plutôt que d’être enfermer avec des hommes pareils en haute montage sans possibilité de partir. La notion de survie pouvait faire faire n’importe quoi.

Elle tendit la main vers son holster tandis que le shérif en faisait de même. Résultat au milieu de la cuisine de faisait face deux ennemis chacun d’un coté de la table, l’arme braquer l’un sur l’autre, à peine à deux mètres de distance sous l’œil sidéré des adjoints.

« Poser votre arme shérif. »

« Regardez vous Lisbon, vous n’êtes rien. Vous avez vu l’état de vos mains ? Comment pourriez-vous tirer hein ? On est quatre… Je vous le rappelle. »
« Vraiment ? Vous me mettez au défi ? Je n’ai besoin que d’un doigt pour appuyer sur la gâchette et mon arme n’a plus sa sécurité ? Vous voulez tenter votre chance ? Et sans vouloir vous contredire vos adjoints ne semblent pas avoir le même point de vue que vous sur la question. »

« Joe, Bill, Vince, prenez lui son arme. »

Les trois adjoints se regardaient ne sachant que faire.

Bill prit enfin la parole.

« Boss, elle est du CBI et elle dit vrai. Enfin… Elle et Jane sont les plus qualifiés… Et je veux m’en sortir… »

« T’es qu’un lâche Bill. Je m’en suis toujours aperçu. Une larve et rien d’autre. »

Lisbon tenta encore sa chance. Elle voulait le shérif avec elle et pas contre elle. Ils étaient déjà coincés ensemble, si en plus une mutinerie semait la zizanie, elle ne serait plus vraiment capitaine d’un navire qui commençait déjà à bien sombrer.

« Shérif, écoutez. Moi aussi je veux m’en sortir et vous aussi j’en suis sure. Mais il faut que l’on s’en sorte ensemble. Alors on va tout oublier, et ensemble, on va tranquillement remettre nos armes dans nos holsters, et continuer la conversation sur notre survie autour d’un café dans le salon. On va examiner les indices, et tout ira bien. »

Le shérif se calmait mais restait à cran et une balle perdue ou n’importe quelle distraction pourrait le faire appuyer sur la détente …

« Shérif, posez votre arme maintenant. S’il vous plait. Bill, Joe et Vince sont d’accord avec moi. Alors contrôlez vous et faites moi confiance. »

Le shérif la regardait, les yeux furibonds, puis soudainement éclata de rire. Un rire qui donna même le frisson à Kristina.

« Confiance ? Et qui me dit que c’est pas vous qui avez fait tout ça ? Et que c’est pas votre grand ami Patrick Jane qui est au cœur de tout ça, hein ? »

Lisbon commençait à désespérer quand celui que personne n’attendait plus rentra tranquillement dans la cuisine, se servit une tasse de café – curieusement le thé ne lui semblait que peu fiable, et se tint entre Lisbon et le Shérif, incrédule.

« Rien ne vous le garantie shérif. Mais je vais vous dire une chose. Jamais personne n’a eu autant envie que moi de me venger de cet homme ; jamais personne ne s’est vu offrir dans un paquet cadeau la chose que sa fille tenait quand cet homme l’a tué ; jamais personne ne s’en ai jamais autant voulu que moi pour ce que j’ai indirectement fait à ma fille et à ma femme en les mettant à la merci de ce tueur. Et jamais personne n’a voulu autant que moi me sortir d’ici et faire sortir ceux qui comme ma femme et ma fille sont des prisonniers de ce malade. Alors maintenant, vous me faites confiance à moi et à Lisbon ou au psychopathe qui vous a piégé pour vous tuer en même temps que nous ? »

Le shérif le regardait. Il cachait sa peine, mais on voyait qu’il avait été anéanti encore une fois. Il baissa son arme, retourna son regard sur Lisbon et prononça ces mots.

« Alors, quel est le plan boss ? »

La SUITE !

« Alors, quel est le plan boss ? »

Chalet de Heavencrest, 21 décembre, 15 heures.

- Lisbon -

Le plan … trouver un plan n’est rien, le respecter et le mettre en œuvre par contre… c’était la pensée de Lisbon tendit qu’elle contemplait d’un œil incrédule Jane, qui dans une tasse de thé, buvait du café, sa jolie petite cuillère posée sur la soucoupe, se fichant comme d’une guigne de ce qui venait de se passer quelques secondes plus tôt.

Pour le coup ce fut la goutte de café qui fit déborder la tasse…. Lisbon sortit précipitamment de la cuisine, et à son tour partit s’isoler.

Du moins elle le souhaitait vivement. Elle atterrit dans une chambre sombre de l’étage, avec une bougie pour toute lumière. Glauque, oui mais ça correspondait finalement à son humeur du jour…

Pour qui la prenait-il ? Monsieur essaie encore de se la jouer perso, et elle devrait suivre sans poser de questions comme un petit chien bien élevé ?

Pourquoi lui faisait-elle toujours confiance malgré tout ce qu’il avait et s’apprêtait à faire. Elle l’ignorait… cette fichue aura, ce charisme qui agit sur chacun d’entre eux ainsi.

On disait qu’il n’y avait qu’un pas entre l’amour et la haine… Alors elle s’amusait à se balancer sur une corde raide en pleine tempête entre deux immeubles à 300 mètres de hauteur…

Pourquoi ce maudit shérif ne demandait pas à Jane de lui en faire un … Comme ça elle se reposerait en mettant une pancarte juste au dessus d’elle : « je suis une bonne poire, tuez moi. Jane a un plan, qu’on en finisse maintenant. »

Mais non car Jane, avait encore besoin d’elle. Miss bouche-trou. Elle a le flingue, le pouvoir et lui fait ce qu’il veut, manigances, trouve tout avant tout le monde en la laissant derrière, seule, amère, prenant les coups que Monsieur lui laisse gentiment.

Et aujourd’hui, elle a encore failli – définitivement cette fois – y passer. Parce que Jane avait plus ou moins compris et qu’il n’avait rien dit… Lui et ses plans foireux…

Avait-il jamais pris en compte ce qu’elle ressentait ? Avait-il un jour vraiment montré ses sentiments ? Quand il avait enlevé sa bague, c’était pour de vrai ? Ou sachant sa dernière heure proche, il voulait en profiter ? Ou était ce encore une stratégie pour berner John Le Rouge ?

Trop de questions, peu de réponses et un sentiment d’échec grandissant.

Quelque chose d’humide et de froid glissait sur ses joues… elle pleurait, depuis quand elle n’avait pas pleuré ? Pourquoi tout lui échappait toujours…

Cette amère déception cachée sous son manteau de sentiments complexes pour Jane restait là, coupante comme une lame de rasoir. Mais cette fois l’entaille était trop profonde. Elle saignait abondement.

Trahie, bafouée, rejetée, perdue, mal-aimé. Ce maelstrom tournait, pourrissait, s’amplifiait.

Ce qu’elle pouvait haïr Jane, se haïr de l’aimer, de le comprendre, de le suivre malgré tout.

Mais aujourd’hui tout était terminé. Elle en avait fini avec tout ça. Elle en avait assez de jouer, assez de vivre, assez de tout. Elle se contentait de fixer la bougie. Puis la fenêtre. Elle s’endormirait, engourdie par le froid glacial, ne se réveillerait plus, ne ressentirait plus…

Mais ça aussi c’était trop simple. Elle était Teresa Lisbon. Une des meilleures enquêtrices, une femme forte, du moins en apparence, et aucun meurtrier quel qu’il soit ne la tuerait. Alors pour cette enquête encore elle continuerait. Pour cette enquête encore elle se battrait, pour que tout le monde soit en vie, et qu’elle puisse partir en paix, loin de son travail, de ses pseudos amis, de ses collègues mais surtout de Jane.

Juste partir.

- Jane -

Il regardait le shérif et ses adjoints, son air détaché et tranquille cette fois ne trompait personne. Même lui-même n’avait plus à se cacher de sa réalité trop morbide.

Il était encore allé trop loin avec Lisbon. Trop loin avec tout le monde, il jouait et sa vengeance l’obsédait de plus en plus, atteignant son paroxysme, brisant tout sur son passage.

John Le Rouge, il le savait, et il se faisait prendre au piège malgré lui. Un sourire cynique vint sur ses lèvres pincées. Stupide. Il avait été stupide. Et il perdait tout.

Il avait encore tué une famille. Probablement empoisonné Kristina. Certainement brisé tout ce en quoi il croyait.

Et aujourd’hui, il avait perdu ce qu’il lui restait de plus proche, de ce qui le faisait vivre malgré sa vengeance. Lisbon.

Comment refuser de ressentir ? La peur d’un autre deuil, la peur de la voir se faire tuer. Mais c’est quand il est arrivé au CBI qu’il les a mis en danger. Car il aurait du savoir que ce brin de femme était aussi têtu que lui, voir même pire.

En deux jours, il avait appris à ré-aimer, à comprendre, à pardonner dans un sens, à se donner puis à replonger, à comploter, à taire ce qu’il était, à tout bousiller surtout.

Il l’avait trahie. Comme il avait trahi les siens. Il avait tué un coté de Teresa Lisbon.

Une fois tout ceci terminé, il partirait, enfin s’ils s’en sortaient. Il partirait et la laisserait en paix, en espérant qu’un jour, elle lui pardonne ce qu’il lui avait fait subir pendant toutes ses années ou elle avait été là pour lui, à passer sous silence tous les affronts, les peines qu’il avait apporté. Ce jeu ou l’on se rapproche pour mieux s’éloigner.

Il semblerait que cette fois il soit fini pour de bon.

Pardonnes moi, Teresa. Une fois encore, et pour la dernière fois, pardonnes moi.

Chalet de Heavencrest, 17 heures, chambre, 1er étage.

Lisbon émergeait doucement de la torpeur dans laquelle elle était tombée. Trop fatiguée, vidée elle s’était pour une fois laisser aller.

La sensation d’engourdissement et de léger mal de tête s’apaisant doucement, elle essaya tant bien que mal de se mettre debout.

Mais un vertige et une douleur lancinante la forcèrent à retomber sur le tapis de la chambre obscure. Son abdomen semblait se déchirer à chaque respiration, chaque mouvement, sa gorge desséchée l’empêchant d’appeler du secours.

Des larmes de douleurs et de détresses roulaient sur ses joues pâles, exsangues. Elle fit un mouvement pour tenter de comprendre d’où venait la douleur. Pas de blessures, pas de sang, rien. Une autre solution s’imposa.

La nausée, le mal de tête, sa bouche sèche, sa douleur, on l’avait droguée. Comment ? Peu importait. C’était un avertissement.

« Allez réfléchis Lisbon… A quoi correspondent les symptômes ? »

Mais ses pensées devenaient confuses. Elle était seule. Dans une chambre éloignée, sans personne.

Quand soudain…