Promenons nous dans les bois ^

*****

Ne compter que sur soit

La voiture roulait depuis déjà plusieurs minutes, Jane et Lisbon se tenaient toujours la main, refusant de se lâcher. Lisbon avait une petite idée de ce qui se passait dans la tête de Travis, elle se souvenait encore de ce qu’il lui avait crié lors de la fusillade, ces mots de haine intense et elle frissonna rien qu’en pensant à ce qui allait se passer maintenant. Cet homme l’accusait de la mort de l’autre, de celui qui avait voulut les aider et il voulait tout simplement se venger. Pour lui, les responsables de cette mort n’étaient autres qu’elle et Van Pelt. La jeune femme tourna la tête vers Jane dont les yeux fixaient leurs doigts toujours entrelacés. Elle les resserra et Jane leva enfin son regard vers elle, un regard brillant et apeuré à la fois.

Lisbon lâcha la main de Jane, bien qu’il tente de l’en empêcher, et la leva vers son visage. Elle lui caressa la joue, se surprenant elle-même pour ce geste si intime et encore un peu étranger. Bien qu’ils se soient embrassés plus tôt, qu’ils aient partagé quelque chose de très intime à peine moins d’une heure plus tôt, elle se sentait encore un peu mal à l’aise. Mais Jane en avait besoin, autant qu’elle.

-“ On va s’en sortir Jane” murmura-t-elle.
-“ Et si ce n’était pas le cas” répondit-il tout aussi doucement.
-“ Je refuse de les laisser me prendre ce que je viens enfin de trouver” souffla-t-elle de façon ferme. “ Je refuse de vous perdre.”
-“ Lisbon, pourquoi nous ont-ils emmenés ?”
-“ Par vengeance.”

A l’entente de ce mot, Jane se sentit mal. Ce mot faisait partie de son quotidien depuis si longtemps, depuis tant d’années. Mais il ne s’était jamais retrouvé de ce côté ci, enfin une fois, mais aujourd’hui c’était différent, il avait avec lui la personne la plus importante dans sa vie et elle risquait de mourir. Il ne revenait pas sur sa décision de venger la mort de sa famille, mais il ne laisserait personne lui prendre Lisbon, quel qu’en soit le prix. Il ne la laisserait pas mourir sans se battre pour elle, même s’il n’était pas un homme courageux, même si c’était toujours Lisbon qui se battait pour le protéger.

-“ Je ne les laisserais pas vous faire de mal Lisbon” assura-t-il.
-“ Ce n’est pas après moi qu’ils en ont Jane, mais après vous” répondit-elle.
-“ Pourquoi ? Je ne comprends pas ce que j’ai à voir la dedans.”
-“ Ils me croient responsable de la mort de l’un d’eux.”
-“ Expliquez-vous, je ne vous suis toujours pas.”
-“ L’un des chasseurs, le plus jeune, s’est rebellé contre les autres et nous a aidé. Celui qui est au volant l’a tué et maintenant il veut venger sa mort en me prenant quelque chose.”
-“ Oh !” fut tout ce qu’il trouva à dire.

Le silence retomba à l’arrière du véhicule mais Jane repris la main de Lisbon, comme pour la réconforter, comme pour lui dire que tout se passerait bien. Il voulait tout autant se rassurer lui-même car il ne savait pas du tout comment ils pourraient se sortir de cette situation. Mais il ne voulait pas que Lisbon se fasse du souci pour lui, il avait put voir dans ses yeux à quel point elle avait peur, il n’était d’ailleurs pas habitué à ça. Lisbon n’avait peur de rien, c’était bien connu, alors la voir aujourd’hui ainsi. Il ne voulait plus jamais voir ça dans son regard, il ne voulait plus jamais y voir autre chose que de la joie et du bonheur.

Finalement, l’homme arrêta le pick-up, sortit et le contourna avant de venir ouvrir la porte arrière. Jane ne tenta même pas de fuir, l’autre homme se tenait là avec son fusil, cela aurait été trop risqué pour lui, et encore plus pour Lisbon. Il se contenta de suivre les instructions, pour la première fois de sa vie. Sa main n’avait pas quitté celle de Lisbon et il la resserra encore plus dans la sienne. Ils avancèrent tous sur un petit chemin de terre boueux avant de se retrouver devant une maison. Le mentaliste se douta qu’il ne s’agissait pas de celle d’où avait appelé Lisbon quelques jours plus tôt, mais plus d’une résidence secondaire, un endroit où se cacher si jamais ils avaient des problèmes.

Jane n’avait pas réussi à repérer la route qu’ils avaient pris, la nuit était si sombre, sans lune, il n’avait rien vu. Et puis de toute façon il n’avait pas vraiment regardé la route, mais plutôt Lisbon, sa belle Lisbon, la femme qu’il aimait de tout son cœur. Il regretta de ne pas lui avoir parlé plus tôt, de ne pas lui avoir dit à quel point elle était importante pour lui. Il regretta d’avoir attendu cette nuit, d’avoir eut trop peur de ce qu’il ressentait pour elle. Maintenant qu’ils s’étaient tout avoué, ils risquaient de ne jamais pouvoir en profiter et c’est-ce qui lui faisait peur.

Les hommes les firent entrer dans la cabane et avancer jusqu’au fond où ils les enfermèrent a double tour. Immédiatement, la jeune femme se mit à chercher dans tous les coins si elle ne pouvait pas trouver comment sortir d’ici. Jane la regarda faire un moment, passant dans un coin de la pièce, passant au suivant, passant ses mains sur les murs avec toujours l’espoir de pouvoir les faire sortir d’ici. Au bout de quelques minutes, n’y tenant plus, Jane la rejoignit, posa ses mains sur ses épaules et la tira contre lui.

-“ Ça suffit Lisbon, venez donc vous asseoir.”
-“ Je dois d’abord trouver un moyen de sortir d’ici” répondit-elle en se dégageant de ses mains.
-“ Teresa” lui dit-il sèchement.

D’entendre Jane l’appeler par son prénom stoppa la jeune femme dans ses recherches, la faisant se retourner pour lui faire face. Il y avait quelque chose dans son regard, un mélange de peine, de colère, de peur et d’amour. Elle se sentit mal d’avoir agit de la sorte avec lui, de l’avoir repoussé alors qu’il ne voulait que l’aider. Elle se sentit honteuse, terriblement honteuse de ce qu’elle venait de lui faire.

Lisbon fit un pas en avant, hésitant à se rapprocher de celui qui faisait battre son cœur. Elle ne savait pas s’il lui pardonnerait son comportement, peut-être avait-elle été trop dure avec lui. Elle sentit une larme couler sur sa joue et elle s’arrêta à mi-chemin, se laissant tomber sur le sol.

Jane arriva aussitôt auprès d’elle, passant ses mains autour de ses épaules et la serrant fort contre lui. De la voir pleurer comme ça lui faisait si mal, il n’aimait pas la savoir si triste. En l’appelant comme ça il n’avait pas voulu lui faire de peine, il avait juste voulu qu’elle s’arrête, qu’elle vienne vers lui. Il avait besoin d’elle plus qu’elle ne pouvait l’imaginer et de se retrouver dans cette situation lui faisait si peur.

-“ Teresa” reprit-il d’un ton doux.
-“ Je… je suis désolée… Patrick. Je voulais juste nous sortir d’ici.”
-“ Je sais, mais je sais aussi que ça ne sert à rien d’agir ainsi. Je ne veux pas de l’agent Lisbon avec moi ce soir, je veux juste Teresa, la femme qui m’a apprit à revivre, à aimer de nouveau. C’est cette femme que je veux.”
-“ Mais je dois trouver un moyen de partir d’ici, je ne peux pas les laisser vous faire du mal, je ne me sentirais plus moi-même si jamais vous deviez mourir.”
-“ Je n’ai pas l’intention de mourir tout de suite Teresa, mais nous avons besoin de repos pour pouvoir survivre à ce qui nous attend.”
-“ Vous avez raison.”

Le couple s’installa contre le mur du fond, Lisbon se calant le dos contre le torse de Jane, le laissant lui entourer la taille. Elle posa sa tête contre son épaule et ferma les yeux. Jane n’avait pas tort et pour une fois elle voulait bien le reconnaître. Elle voulait s’en sortir, avec lui, mais ce n’était pas en s’activant comme elle le faisait qu’ils y arriveraient. Alors qu’ils allaient s’endormir l’un contre l’autre, savourant leur première nuit ensemble, Lisbon pouffa de rire.

-“ Qu’est-ce qu’il y a de si drôle ?” demanda Jane.
-“ Rien, c’est juste que… je me disais que c’était notre première nuit ensemble.”
-“ Et c’est ça qui vous amuse ?”
-“ Disons que je ne la voyais pas comme ça.”

Jane sourit à son tour avant d’embrasser la jeune femme sur la tempe et de fermer les yeux. Lui non plus d’imaginait pas leur première nuit ainsi, il la voyait plutôt chez elle, dans sa chambre, la tenant contre lui pour dormir. Il n’était pas vraiment prêt à aller plus loin avec elle, il ne savait pas s’il le serait un jour. Mais Lisbon était spéciale, cette femme avait toujours été là pour lui, faisant tout ce qui était en son pouvoir pour l’aider. Alors, il lui faudrait peut-être du temps, mais il travaillerait sur lui pour lui offrir ce dont elle avait besoin, un homme qui prendrait soin d’elle et qui la rendrait heureuse. Oh elle n’avait pas vraiment besoin qu’on s’occupe d’elle, c’était une femme indépendante, mais il se ferait une joie de lui montrer qu’un homme dans sa vie pouvait faire autre chose que l’embrasser ou lui casser les pieds.




Jo faisait les cent pas dans la pièce qui servait à la fois de cuisine, de salon et de chambre à coucher. Il ne cessait de penser à cette femme, cette brune aux yeux verts si intenses. Il avait voulu se venger pour la mort d’Eddie. Mais à présent, il n’était plus vraiment certain de vouloir la tuer, il avait plutôt envie de s’amuser avec elle. Il faut dire qu’il faudrait être idiot pour ne pas la trouver belle, elle était vraiment séduisante. Mais cet homme, ce blond était gênant. Il fallait qu’il trouve un moyen d se débarrasser de lui au plus vite, comme il l’avait déjà prévu avant, mais encore plus vite.

Il lui faudrait d’abord trouver un moyen d’occuper Travis, il savait qu’il ne le laisserait jamais faire ce qu’il avait en tête. Pour lui, la vengeance était tout ce qu’elle méritait, rien de plus. Mais elle pouvait aussi servir à autre chose que ça. Il jeta un œil à Travis qui somnolait sur le lit, il avait encore une fois bien trop bu et il lui faudrait du temps avant de déssouler, assez de temps pour qu’il puisse s’occuper de la femme.

Jo avança vers la porte du fond le plus silencieusement possible, histoire de ne pas réveiller Travis. Il ouvrit la porte, cette fois encore le plus silencieusement qu’il le put et ses yeux s’habituèrent à la pénombre. Il trouva la femme allongée au fond, juste à côté de l’homme blond, celui qui devait être son petit ami à en juger la main qui se trouvait sur la hanche de la femme. Il la vit rouler sur le côté, se dégageant de la main de l’homme. C’était sa chance et il allait la saisir, alors il s’approcha doucement d’elle, se pencha près de son oreille et posa sa main sur sa bouche afin qu’elle ne crie pas. Elle ouvrit brusquement les yeux, tenta de se dégager de lui, mais il sortit un couteau de sa poche et le posa sur son cou.

-“ Tu dis un mot et il est mort, et toi aussi” souffla-t-il.

Les yeux de Lisbon s’agrandir d’horreur à la simple idée que Jane pourrait mourir à cause d’elle. Alors elle acquiesça silencieusement et se leva pour le suivre. Avant que la porte se ferme, elle jeta un dernier coup d’œil à son consultant qui dormait toujours aussi bien et elle pria pour qu’il arrive à quitter cet endroit de lui-même, sans qu’il ne lui arrive rien.

Jo la fit monter dans le Pick-up, mais il lui banda les yeux avant et lui attacha les mains. Elle se laissa faire sans ne rien tenter, elle devait rester en vie si elle voulait pouvoir revenir pour aider le mentaliste. Le véhicule démarra et s’éloigna rapidement de la cabane, éloignant ainsi la jeune femme de l’homme qu’elle aimait. Personne ne remarquerait leur départ avant le matin, ce qui leur laissait assez de temps pour partir loin.




Jane roula sur le côté, cherchant Lisbon avec sa main mais il ne rencontra que du vide. Il ouvrit les yeux en se redressant vivement, la peur au ventre. Il chercha partout du regard mais elle n’était nulle part. Mais où pouvait-elle bien être ? Il n’aimait pas ça, il n’aimait pas ça du tout et il eut un mauvais pressentiment, il sentait qu’il était arrivé quelque chose à Lisbon. Il se leva d’un bond et tambourina à la porte comme un fou, jusqu’à ce qu’elle s’ouvre.

-“ Quoi ?” Rugit Travis.
-“ Où est-elle ?” S’énerva Jane.
-“ Qui ?”
-“ Teresa, où est-elle ?” Redemanda Jane.
-“ Où veux-tu qu’elle soit ? Dans la pièce avec toi bouffon.”
-“ Non elle n’est pas là, alors où est-elle ?”

Travis sembla reprendre conscience subitement, les effets de l’alcool se dissipant bien plus vite que jamais. Il poussa Jane sur le côté, entra dans la pièce et commença à chercher Lisbon, mais il ne la trouva pas. Faisant demi-tour, il poussa de nouveau Jane qui n’avait pas bougé et chercha Jo qu’il ne trouva pas plus. Il compris alors ce qui se passait.

“ L’enfoiré ! ” cria-t-il. “ Il est partit avec elle.”
-“ Quoi ? Qui est… oh non.”
-“ Il a toujours voulu une femme et il est partit avec elle.”

Jane se laissa tomber au sol, encore sous le choc de ce que venait de dire Travis. L’homme avait emmené Lisbon pour en faire sa femme et il ne savait même pas où ils étaient partit. Mais ce qu’il ne comprenait pas c’était pourquoi Lisbon ne s’était pas défendue, pourquoi elle avait laissé un homme l’emmener ainsi sans rien faire. Elle n’était pas comme ça, elle ne laissait jamais personne faire d’elle ce qu’il voulait. Lisbon avait toujours sut se faire respecter et il voulait savoir pourquoi cette fois était différente. Il releva les yeux vers Travis qui ruminait sa rage en faisant les cent pas dans la pièce. Il semblait vraiment désappointé par le comportement de son complice, ce qui intriguait Jane et il décida de savoir pourquoi.

-“ Pourquoi est-ce que ça vous gêne ce qu’il a fait ?”
-“ Je voulais me venger oui, venger la mort de mon frère, mais pas ça.”
-“ Que va-t-il faire d’elle ? Il ne va pas…”
-“ Je sais pas, mais on doit le trouver avant qu’il ne soit trop tard.”

Travis se tourna vers Jane qui attendait toujours alors qu’il aurait pu en profiter pour partir.

-“ Pourquoi t’es encore là toi ?”
-“ Vous connaissez Jo bien mieux que moi et je veux retrouver Teresa.”
-“ Je sais pas où il est, comment tu veux que je la trouve ?”
-“ Vous avez passé votre vie avec lui, vous savez où il aime aller quand il veut être seul, il suffit juste d’y aller.”
-“ Ouais je sais.”
-“ Alors allons-y.”
-“ Pas maintenant, il fait trop noir. On ira demain matin à la première heure.”
-“ Mais Teresa est seule avec lui, on ne peut pas la laisser.”
-“ Et on ne verra rien dans le noir, il vaut mieux attendre demain.”

Jane se leva et retourna dans la pièce au fond de la maison. Il aurait put partir, mais il savait qu’il ne retrouverait jamais sa route seul, ni même Lisbon. Il avait besoin de Travis pour la retrouver, lui seul savait où les trouver. Il s’assit au fond contre le mur, comme plus tôt avec Teresa, sauf que cette fois il était seul. Il pria pour elle, pour qu’elle tienne le coup et qu’il ne lui arrive rien jusqu’à ce qu’il la retrouve. Il leur faudrait ensuite prendre la fuite et Jane savait que s’il utilisait son pouvoir de manipulation sur Travis, ce ne serait pas bien difficile. Il fini par s’endormir avec une fois encore l’image de Teresa souriante dans la tête.




Jo roulait comme un fou sur le petit chemin de terre, ne prêtant aucune attention à ce qui se passait à l’arrière du pick-up. Lisbon se dit que c’était là sa chance, que tant que Jo ne faisait pas attention à elle alors c’était le moment de prendre la fuite. Elle s’avança vers l’arrière du véhicule et sauta, roulant sur le chemin jusqu’à ce qu’elle finisse contre un arbre un peu trop brusquement. Elle attendit que Jo soit assez loin pour se lever et fini par se lever. Elle frotta son visage contre le tronc de l’arbre afin d’enlever son bandeau, se râpant la joue au passage, mais quelle importance. Elle commença ensuite à avancer dans le noir, tentant d’éviter les trous dans le sol et tout ce qui pourrait la faire trébucher. Elle ne savait pas où elle devait aller, mais le plus loin possible de Jo serait le mieux.

*****

Course contre le temps

Il faisait froid et humide, les bruits environnant était assez effrayants, mais la jeune femme continuait d’avancer, ne sachant pas où elle se rendait, pourvu que ce soit le plus loin possible. Cela faisait plusieurs minutes qu’elle avançait à l’aveugle entre les arbres, ne se fiant qu’à son instinct, et pour le moment tout semblait aller bien. Mais la chance ne durait jamais bien longtemps, surtout ces derniers jours et Lisbon fini par tomber, trébuchant sur une branche au sol. Malheureusement pour elle, Jo lui avait attaché les mains dans le dos et elle ne put amortir sa chute. Elle se retrouva la tête la première entre les feuilles mortes et pesta une fois de plus contre sa mauvaise étoile.

Elle se releva difficilement, ses jambes la faisant souffrir, ses bras, son visage. En fait, il n’y avait pas une partie de son corps qui ne la faisait pas souffrir. Mais le pire était son cœur, elle se faisait tant de souci pour Jane. Le mentaliste se trouvait seul avec l’autre chasseur et, connaissant Jane, il ne tiendrait pas sa langue bien longtemps et pourrait écourter son espérance de vie, déjà pas bien longue. Elle savait que lorsqu’il se réveillerait et qu’il constaterait son absence, il deviendrait fou d’inquiétude. Elle le connaissait depuis suffisamment d’années pour connaître ses réactions et elle avait peur qu’il ne dise ou ne fasse n’importe quoi. Voilà pourquoi elle s’évertuait à avancer dans le noir, elle voulait retourner auprès de lui le plus vite possible.

Au bout d’encore quelques minutes, Lisbon fit une pause contre un arbre. Elle n’en pouvait plus, elle ne savait pas dans quelle direction aller et son cœur battait de plus en plus vite dans sa poitrine. Elle était essoufflée et si elle ne prenait pas le temps de reprendre son souffle, elle savait qu’elle n’y arriverait jamais. Avec de la chance, Jane était encore en train de dormir et ne se rendrait compte de rien avant quelques heures, elle l’espérait vraiment.

Lisbon se releva, prête à reprendre sa marche lorsqu’elle entendit un drôle de bruit derrière elle, un bruit qui ne lui plaisait pas du tout. Lentement, sans précipitation, elle osa tourner la tête pour tomber sur deux billes brillantes dans le noir. Elle ne savait pas d’où venait la lumière pour les faire briller, mais elle savait qu’elle ne devait pas perdre de temps dans le coin. Mais si elle se mettait à courir, alors le monstre, ou plutôt le loup, se mettrait à courir après elle et elle n’avait aucune chance vu sa condition actuelle. Que devait-elle faire ? Comment se sortir de là sans mal ? Mais alors qu’elle réfléchissait aussi vite que possible, un éclair illumina la nuit et elle entendit la bête gémir avant de tomber au sol.

-“ Tu es tout à moi maintenant” entendit-elle.
-“ Oh non” souffla-t-elle en se rendant compte que Jo l’avait retrouvée.
-“ Tu ne m’échappera pas cette fois” ricana-t-il en s’approchant.
-“ Tu veux parier” répondit-elle avec un petit sourire.

Elle voulait paraître sur d’elle, mais elle ne l’était pas du tout. La peur lui tiraillait le ventre et cette fois ce n’était pas pour Jane. Elle était seule dans une forêt, les mains liées dans le dos, aux prises avec un chasseur au regard lubrique armé d’un fusil pointé vers elle. Que pouvait-elle faire ? Courir ? Cela semblait être la bonne chose à faire, il ne la voyait pas vraiment, il faisait très noir et elle pourrait utiliser ce fait pour s’échapper. Sans réfléchir une seconde de plus, elle se mit à courir droit devant elle, ne sachant toujours pas où elle allait, mais elle y allait quand même.

-“ Ça sert à rien de fuir ma belle, je t’aurais” cria-t-il derrière elle.

Mais Lisbon ne s’arrêta pas pour autant, au contraire elle accéléra sa course. Elle ne voyait pas, mais elle laissait parler son instinct, sautant lorsqu’il le fallait, se baissant au bon moment, contournant les arbres avec l’agilité d’un athlète. Elle s’en étonnait elle-même, mais elle n’avait pas vraiment le temps d’y penser pour l’instant. Elle entendait Jo derrière elle se rapprocher, il connaissait mieux l’endroit qu’elle après tout. Mais elle ne lui laisserait pas la chance de faire d’elle ce qu’il voulait, elle se battrait jusqu’à la mort, lui prouvant ainsi qu’elle n’était pas qu’une minette incapable de se défendre. Elle pria pour que ses collègues s’aperçoivent de son absence avant le matin, que quelqu’un ait vu quelque chose.




Grace tournait dans son lit, ne parvenant pas à trouver le sommeil. Elle était en sécurité maintenant, mais elle ne se sentait pas bien, elle avait un mauvais pressentiment, son instinct de flic peut-être. Elle avait passé tant de temps loin de la civilisation, deux jours en pleine forêt, qu’elle n’arrivait pas à se calmer. Elle voulait parler à Lisbon, la seule à pouvoir la comprendre, la seule à savoir ce qu’elle ressentait en ce moment. Rigsby avait voulu la faire parler, disant que ça pourrait l’aider à passer une meilleure nuit. Mais elle avait refusait, elle ne se sentait pas prête à lui parler à lui. Elle avait rêvé, tout au long de ces deux jours, de le retrouver et de lui dire ce qu’elle ressentait pour lui, mais elle ne se sentait plus aussi prête qu’elle l’avait pensé plus tôt.

La jeune femme se leva de son lit, mis une veste et sortit de la chambre de son collègue. Elle alla directement vers la chambre de Jane, sachant parfaitement qu’elle y trouverait Lisbon. Elle avait vu la façon dont ils s’étaient regardés lors de leurs retrouvailles, la façon dont Lisbon s’était jetée dans les bras du blond comme si elle retrouvait son amour perdu. C’était si beau, si romantique, qu’elle avait versé quelques larmes. Alors quand le couple, oui elle les voyait déjà comme un couple, avaient décidé de rentrer ensemble de l’hôpital, sans les autres, elle avait sut qu’ils partageraient la même chambre. Elle les connaissait assez pour savoir que Jane refuserait de passer la nuit loin de Lisbon, même s’il devait dormir sur une chaise.

Elle frappa à la porte, attendant de voir Jane lui ouvrir et lui dire que Lisbon dormait et qu’il ne voulait pas la réveiller. Mais il n’ouvrit pas la porte, elle n’entendit pas le moindre bruit, pas la moindre protestation. Intriguée, elle frappa encore une fois mais toujours rien. Cette fois elle était inquiète, ce n’était pas normal. Elle savait que Jane avait le sommeil léger, quand il parvenait à dormir, et dans la situation actuelle elle savait qu’il ne dormirait pas. Alors il aurait dut lui répondre, ouvrir la porte. S’il ne l’avait pas c’est qu’il y avait un problème et elle se devait de faire quelque chose.

Grace retourna sur ses pas et se dirigea vers la chambre de Rigsby. Elle ne voulait pas paraître alarmiste, mais elle se sentirait mieux lorsqu’elle aurait vut ses collègues, tous ses collègues et pas seulement Cho et Rigsby. Une fois devant la porte, elle n’hésita pas et frappa si fort qu’elle s’en fit mal à la main. La porte s’ouvrit presque aussitôt sur un Cho parfaitement réveillé, portant toujours ses vêtements de la journée.

-“ Un problème Van Pelt ?” demanda-t-il en la laissant entrer dans la chambre.
-“ Jane et Lisbon ne répondent pas à la porte” lui dit-elle en se tournant vers lui.
-“ Ils doivent sûrement dormir” hasarda Rigsby qui les avait rejoints.
-“ Jane ne dort pas, et encore moins maintenant qu’il a retrouvé Lisbon” contra la rouquine.
-“ Alors ils doivent profiter de leurs retrouvailles” dit-il avec un petit sourire en coin.
-“ Je ne crois pas non plus. Venez avec moi.”

Elle ressortit de la chambre, suivit de près par les deux hommes qui commençaient eux aussi à se faire du souci. Elle avait raison, Jane ne dormait déjà pas beaucoup en temps normal alors sûrement pas ce soir. Et ils savaient tous que, malgré ses sentiments pour leur patronne, il n’était pas prêt pour une relation avec une femme, pas plus que Lisbon. Il devait y avoir un problème et ils voulaient savoir lequel. Peut-être que la blessure de Lisbon s’était aggravée et qu’ils avaient dut retourner à l’hôpital, mais dans ce cas Jane les aurait sûrement prévenus, alors ce devait être autre chose.

Les trois agents arrivèrent devant la porte de la chambre du consultant et Cho frappa, attendant une réponse qui ne vint pas. Il retenta encore une fois sans plus de succès alors il décida d’entrer dans la chambre, espérant juste ne pas tomber sur une image qui risquait de le hanter pendant longtemps. Jane lui avait appris, ainsi qu’aux autres, comment crocheter une serrure et il ne pensait pas devoir un jour utiliser cette pratique, mais il fut heureux de savoir le faire. Il fallait juste ne rien dire à Lisbon, elle risquait de ne pas apprécier.

Il entra dans la chambre, s’habituant doucement à la pénombre et constata rapidement qu’elle était vide. Ni Jane ni Lisbon ne s’y trouvaient et il trouva ça louche. Ils ne seraient pas partit sans prévenir, il y avait définitivement quelque chose qui n’allait pas. Il fouilla la chambre, trouvant les affaires de Lisbon, sa veste posé sur la chaise près du bureau, mais pas ses chaussures. Par contre, la veste de Jane ne s’y trouvait pas. Il eut alors l’idée d’appeler le mentaliste, il devait certainement avoir son téléphone avec lui.




Jane était assis, le dos contre le mur, les jambes repliées contre sa poitrine, la tête sur les genoux. Il avait gagné une part de la confiance de son ravisseur, c’était déjà ça, mais pas assez à son goût. Il aurait voulu partir tout de suite à la recherche de Lisbon et non pas attendre le lendemain matin, la jeune femme avait besoin de lui. Il savait qu’elle était parfaitement capable de se défendre en temps normal, mais elle était blessée et l’homme était fort. Elle ne pourrait pas faire grand-chose contre lui et se retrouverait vite en position de faiblesse.

Déjà dans leur chambre des heures plus tôt, lorsqu’ils s’embrassaient sur le lit, elle n’avait put retenir un gémissement de douleur lorsqu’il avait malencontreusement serré un peu trop fort son bras. Si elle n’avait pas supporté la force de sa main, comment pourrait-elle se défendre contre cet homme ? D’autant qu’il avait une idée bien précise en tête, quelque chose qui donna des frissons à Jane rien que d’y penser. Il ne voulait pas que cet homme la touche, il ne voulait pas qu’il fasse d’elle une autre victime des envies sexuelles d’un homme seul et frustré. Il savait qu’elle ne se remettrait pas d’une telle agression, aucune femme ne pouvait vraiment se remettre de ça.

Alors qu’il était complètement perdu dans ses pensées, il sentit quelque chose vibrer dans la poche de sa veste, cette même veste que Lisbon lui avait apportée devant l’hôtel et qui était la raison de son kidnapping à elle aussi alors que les chasseurs ne voulaient que lui. Il attrapa l’objet et tomba sur son téléphone qu’il avait mit en mode silencieux afin de ne pas réveiller la jeune femme. Il avait complètement oublié qu’il l’avait et il s’empressa d’y répondre en voyant le nom de Cho apparaître.

-“ Cho, comme je suis content de t’entendre” dit la voix soulagée de Jane.
-“ Où es-tu Jane ?” Lui demanda l’asiatique.
-“ Je sais pas, les chasseurs sont venus nous prendre devant l’hôtel, mais ils ne voulaient que moi au départ, seulement elle est sortie pour me donner ma veste que j’avais oubliée et voilà.”
-“ Comment va-t-elle ?”
-“ Je ne sais pas, il y a eu un autre problème. L’un des hommes l’a emmenée je ne sais où pour en faire sa femme.”

Cho retint difficilement un grognement de colère. Il sera les poings et tourna la tête vers ses collègues qui ne comprenaient pas ce qui se passait. Il mis alors le téléphone en main-libre.

-“ Ça fait combien de temps qu’elle a disparu ?” demanda-t-il à Jane.
-“ Je ne sais pas vraiment, je dormais quand ça s’est passé, mais je dirais au moins deux heures.”
-“ Où se trouve l’autre en ce moment ?” interrogea Rigsby.
-“ Dans la pièce à côté, il dort.”
-“ Ok, écoute Jane, tu vas laisser le téléphone allumé et Van Pelt va tenter de te localiser avec son ordinateur. Surtout, ne fait pas de bêtise.”
-“ Ça aucun risque, je ne veux pas perdre ma chance de retrouver Te… Lisbon. L’homme m’a dit avoir une idée de l’endroit où son copain avait put l’emmener.”
-“ Il t’a dit où c’était ?”
-“ Non, juste que c’est plus loin encore dans la forêt et qu’on ne pouvait pas y aller avant le jour.”

Pendant que Cho et Rigsby tentaient d’obtenir un maximum d’informations et d’occuper l’esprit de Jane, Van Pelt était retournée chercher son ordinateur que les garçons avaient eu la bonne idée de prendre avant de partir à leur recherche. Elle était revenue dans la chambre et à présent elle pianotait avec frénésie sur les touches, ouvrant des programmes, tapant des codes et finalement elle trouva le signal du téléphone de Jane. Elle ouvrit une carte de la région et affina sa recherche en superposant la carte satellite des réseaux téléphoniques avec la carte de la forêt. Enfin, elle trouva où se trouvait le mentaliste et fit signe à ses collègues que c’était bon.

Cho écourta la communication, expliquant à son collègue qu’ils avaient sa position et qu’ils arrivaient aussi vite que possible. Jane se retrouva de nouveau seul, son téléphone à la main mais un petit sourire sur le visage. Ses collègues étaient formidables, ils étaient toujours là quand on avait besoin d’eux et il savait que dans peu de temps il sortirait de cette cave pour retrouver Lisbon. Il espérait juste qu’il ne lui était rien arrivé de grave pendant ce temps, que l’autre ne l’avait pas touchée. Il ne savait pas ce qu’il ferait si c’était le cas, mais il ne le laisserait pas s’en sortir comme ça. Jane était contre la violence, mais lorsqu’il s’agissait de proches, en particulier de personne vraiment très proche, il était prêt à tout. Pour Lisbon il ferait n’importe quoi, il ne voulait pas perdre une autre femme, il ne survivrait pas à un autre deuil.




Cho, après avoir raccroché, contacta Steve. Ils allaient avoir besoin d’aide, ils ne pouvaient pas se rendre seuls là-bas, ils ne connaissaient pas le coin aussi bien que le garde forestier. Il dut tout de même batailler un moment car l’homme ne voulait pas partir avant le lendemain matin à la première heure, mais cette fois Cho ne fut pas d’accord. Lisbon était seule avec un homme prêt à tout pour faire d’elle sa femme, avec tout ce qui allait avec le mot, elle était blessée et dans l’incapacité de se défendre seule. Hors de question d’attendre encore des heures pour l’aider, c’était maintenant qu’elle avait besoin d’eux, demain il serait trop tard.

Steve fini par accepter et proposa aux agents de le rejoindre au poste, là ils prépareraient tout ce dont ils auraient besoin et ils auraient également l’aide des autres gardes forestiers qu’il appellerait en route. Cho raccrocha, se tourna vers ses collègues et leur sourit, ce qui les perturba un peu.

-“ C’est ok, il nous rejoint au poste et il appelle des renforts” leur dit-il.
-“ Alors c’est parti” sourit Grace en se levant.
-“ Non, toi tu reste là” intervint Rigsby en posant une main sur son bras.
-“ Quoi ? Mais pourquoi ?”
-“ Tu es blessée et…”
-“ Et je suis une grande fille, mes amis ont besoin de moi aussi et il est hors de question que je reste ici sans rien faire comme une fille fragile.”
-“ Mais Grace…”
-“ Il n’y a pas de mais, je viens un point c’est tout.”

Et sur ces mots, elle sortit de la chambre pour aller chercher sa veste dans la sienne, laissant ses deux collègues encore sous le choc de ce qui venait de se passer. Elle sourit en passant la porte, fière de ce qu’elle venait de faire. Lisbon et Jane avaient besoin d’elle, alors pourquoi resterait-elle en arrière, inutile alors que ses deux collègues partaient leur venir en aide ? Elle était blessée, elle ne dirait pas le contraire, et elle avait mal aussi. Mais elle prendrait sur elle aussi longtemps qu’il le faudrait. Lisbon aussi était blessée et un homme avait décidé de faire d’elle sa femme. Elle ne pourrait plus jamais se regarder dans une glace si elle restait là et qu’elle laissait une chose pareille arriver à celle qui était devenue son amie.

Cho lança un regard moqueur à son collègue avant de suivre la jeune femme dans le couloir. Le pauvre Rigsby baissa la tête, penaud, mais d’un autre côté il était fier de Grace. Elle venait de se montrer sous un nouveau jour, elle venait de montrer qu’elle pouvait prendre ses propres décisions, qu’elle était tout autant capable que les hommes de cette équipe et que ce qui lui était arrivé ne l’avait pas plus affaiblie mais au contraire, l’avait rendue plus forte.

Le grand brun partit dans le couloir à la suite des autres avec un petit sourire sur le visage. Ils étaient une équipe, ils se soutenaient les uns les autres et la réaction de Grace lui faisait du bien. Il avait eut peur qu’elle se renferme, qu’elle ne veuille pas en parler, qu’elle ne garde tout en elle. Bien sûr elle n’avait encore rien dit à personne, mais il se doutait que la seule personne à qui elle parlerait était Lisbon. Leur petite aventure dans la forêt avait rapproché les deux femmes, il avait put le constater, alors il était normal qu’elle se sente à l’aise pour parler avec elle. Il espérait juste qu’ils retrouveraient leur patronne avant qu’il ne soit trop tard.

Une fois que tous furent prêts, ils montèrent en voiture et partirent rapidement vers le poste des gardes forestiers. Ils y trouvèrent Steve qui commençait déjà à charger l’arrière de son véhicule avec tout ce qui pourrait leur être utile. Rigsby remarqua trois hommes qui arrivaient eux aussi les bras chargés de diverses choses. Ils étaient au total sept, ce qui mettait les chances de leur côté, les autres n’étant que deux et encore, ils n’étaient même pas ensemble.

Cho gara sa voiture sur le parking devant le poste, les trois agents en sortirent et se dirigèrent directement vers Steve. L’homme déplia une carte sur le capot de son véhicule et Grace lui indiqua où se trouvait normalement Jane.

-“ Ça fait environ vingt kilomètres, ce qui veut dire que nous en avant pour au moins une heure, voir plus.”
-“ Pourquoi tant que ça ?” demanda Grace.
-“ La route est mauvaise par ici” indiqua-t-il sur la carte, “ de plus il fait nuit noire, pas de lune, ce qui va nous ralentir. Et la tempête de l’autre nuit a put faire des dégâts sur le chemin.”
-“ Il va falloir nous séparer pour gagner du terrain” proposa Baxter, l’adjoint de Steve. “ Vous avez dit que l’un des hommes avait emmené votre amie dans une autre cabane et j’ai ma petite idée.”
-“ On t’écoute Bax’.”
-“ Avant de s’installer dans ce petit coin” commença-t-il en montrant la propriété sur la carte, “ la famille de Travis avait une petite cabane perdue dans la forêt. Peu de monde connaît son emplacement, mais j’ai eu l’occasion de m’y rendre il y a plusieurs années. Je sais exactement où elle est et je propose donc que nous nous séparions en deux groupes, un qui ira cueillir Travis et l’autre Jo.”
-“ Je pense que c’est une bonne idée” approuva Cho.
-“ Bien, alors agent Cho, vous irez avec Baxter et Stanley. Agent Rigsby et Van Pelt, vous venez avec moi et Lars, nous allons nous occuper de Travis.”
-“ Ok, tout le monde en route.”

Les deux groupes se séparèrent et montèrent dans les différentes voitures. La nuit touchait presque à sa fin, Jane et Lisbon avaient disparu depuis maintenant plus de cinq heures et il leur faudrait du temps avant de rejoindre les différentes destinations. Il fallait juste espérer que le mentaliste ne ferait rien qui pourrait le mettre plus en danger qu’il ne l’était déjà et que Lisbon ait réussi à trouver un moyen de se sortir des griffes de Jo.




Lisbon courait toujours sans savoir où elle allait, du moment qu’elle s’éloignait de Jo et de ses idées mal placées. Cela faisait un moment déjà qu’elle ne l’avait pas entendu crier derrière elle, mais elle n’avait pas pris le temps de se retourner pour savoir s’il la poursuivait toujours. Elle devait continuer, le jour n’allait pas tarder à se lever et à partir de là, elle pourrait se déplacer plus facilement entre les arbres. Pour le moment elle s’était fiée entièrement à son instinct et tout c’était bien passé, à part une chute un peu brutale mais rien de bien méchant.

Alors qu’elle courait droit devant elle, un bruit juste derrière elle la fit sursauter et elle se jeta de l’autre côté pour éviter quoi que fut la chose ou la personne. Elle roula sur le sol, se protégeant le visage de son mieux et fini par atterrir sur quelque chose de mou et visqueux. Elle sentit comme une sorte de liquide sur son visage et elle osa enfin ouvrir les yeux. Le soleil commençait à se lever, lui donnant assez d’éclairage pour voir ce qui avait amortie sa chute et elle retint un cri étranglé. Elle recula vivement, se frottant de son mieux le visage avec son épaule pour retirer toute trace qui s’y trouvait.

-“ Oh mon Dieu !” souffla-t-elle, “ c’est pas vrai.”

Devant elle, au milieu des feuilles mortes et recouverts de petits verres, se trouvaient les corps de trois adolescent, du moins ce qu’il en restait. Les corps étaient les uns sur les autres, le sang avait coulé le long des visages de jeunes gens, masquant à peine leurs yeux grands ouverts. Lisbon avait déjà vu des corps par le passé, ça faisait partie de son travail après tout, mais jamais elle n’avait vu une telle horreur. Ces jeunes n’avaient pas plus de dix sept ans, ils étaient encore des enfants et ils étaient morts, entreposés là comme de vulgaire morceaux de viande.

Lisbon eut soudain envi de vomir, de rendre tout ce qu’elle avait dans l’estomac. Ces hommes étaient des monstres, des barbares et Jane se trouvait avec l’un d’eux. Elle ne savait pas ce qu’il pouvait vivre en ce moment, s’il était ne serait-ce qu’encore en vie. Elle ne pouvait s’imaginer continuer de vivre sans lui, pas après ce qu’ils avaient vécu. Mais plus ses yeux restaient sur les corps, et plus sa peur montait en elle à un point qu’elle ne connaissait même pas. Jamais de sa vie elle n’avait eut aussi peur pour quelqu’un, pas même lorsqu’elle était enfant et que son père s’acharnait sur elle et ses frères. Aujourd’hui c’était différent, elle était différente et cela lui faisait peur.

Elle détacha enfin ses yeux des pauvres adolescents et se releva difficilement. Mais alors qu’elle allait partir, elle vit quelque chose biller, dépassant de la poche de l’un des garçons. Elle s’approcha doucement, luttant contre l’envie de vomir, et se mit dos au corps pour attraper l’objet entre ses doigts. C’était un couteau, petit mais il pourrait lui servir, et tout de suite même. Elle le bloqua entre deux morceaux de bois sur le sol et frotta ses liens contre la lame, se coupant un peu par la même occasion, mais qu’importe.

Une fois les mains libres, elle rangea le couteau dans sa ceinture, prenant soin de ne pas se couper avec et repris sa marche. Le soleil était levé et Jo n’aurait plus de mal pour la trouver maintenant, elle devait faire vite. Après un dernier regard pour les jeunes victimes, Lisbon se remit en route en se promettant de revenir avec les autres afin de ramener les corps et de permettre aux familles de faire leur deuil. Elle aurait préféré pouvoir leur dire qu’ils allaient bien, qu’ils avaient réussi à trouver un abri, mais la vie n’était pas si facile et il fallait s’y faire.




Alors que Jane commençait à somnoler dans sa cave, du bruit de l’autre côté de la porte attira son attention et il se redressa vivement lorsque le bruit de rapprocha encore plus de la porte. Il ne savait pas vraiment ce qu’il se passait, les voix étaient étouffées par l’épaisseur des murs et de la porte, mais il y avait une bagarre de l’autre côté et il espérait que ce soit la cavalerie. Lorsque les bruits cessèrent, Jane se colla encore plus contre le mur et ferma les yeux quand la porte s’ouvrit. Il entendit des pas précipités et sentit quelqu’un lui sauter dessus.

-“ Oh mon Dieu Jane, tu vas bien ?” lui demanda Van Pelt.
-“ Ça va” lui répondit-il en l’entourant de ses bras.
-“ Content de te voir vieux” lui dit Rigsby en lui donnant une tape sur l’épaule.
-“ Moi aussi, crois-moi. Euh… où est Travis ?”
-“ A l’arrière de la voiture, menotté et bâillonné pour ne plus l’entendre” répondit Steve avec un léger sourire.
-“ Il sait où se trouve Jo, il faut le faire parler” s’activa aussitôt Jane vers la porte.
-“ C’est bon, Cho est en route avec deux gardes forestiers” le rassura Grace. “ Ils vont la trouver.”
-“ Comment savez-vous si elle va bien ? Comment savez-vous qu’ils vont la trouver ?” S’impatienta Jane.
-“ On n’en sait rien pour le moment, mais on va les rejoindre” lui dit Rigsby serrant l’épaule de Jane dans une tentative de réconfort.

Tout le monde se regroupa à la voiture et ils montèrent tous, tentant de rejoindre le plus vite possible le second groupe. Steve contacta Baxter par radio pour savoir s’ils étaient enfin arrivés à la cabane et il répondit positivement. Malheureusement, ni Jo ni Lisbon ne s’y trouvaient et le cœur de Jane s’accéléra à l’idée qu’il ait put l’emmener ailleurs. Ils accélérèrent et la voiture fila à vive allure sur le chemin de terre.

Au bout de plusieurs minutes de ballottage dans la voiture, Jane repéra quelque chose un peu plus loin dans les bois. Il fit signe à Grace qui regarda à son tour et elle s’affola.

-“ C’est Lisbon” cria-t-elle, “ il y a un homme derrière elle.”

La voiture s’arrêta brusquement et Jane descendit le premier, poussant tout le monde pour rejoindre la jeune femme. Mais alors qu’il s’approchait en courant, il fut arrêté de justesse par Rigsby. Ce qu’ils ne pouvaient pas voir de la voiture, c’est qu’une rivière les séparaient de leur patronne et qu’avec la tempête, l’eau avait atteint un niveau impressionnant, les empêchant de la traverser.

Le mentaliste releva la tête vers la jeune femme pour la voir trébucher et s’étaler sur le sol dans un petit cri. Mais alors qu’elle allait se relever, Jo arriva et lui sauta dessus, levant un couteau au dessus d’elle dont la lame brilla avec le soleil. Il abaissa la main brusquement.

-“ NOOONNN!” hurla Jane.