Liens en apesanteur (recueil d'OS) ^

- Patron ?
- Oui ? répondit Lisbon en levant les yeux vers la jeune rouquine qui venait d’entrer dans son bureau.
- Du nouveau dans l’enquête, le…

A cet instant, une sirène retentit dans tout le bâtiment, créant un mouvement de panique tout autour d’elles.

- L’alerte aux explosifs ! cria Lisbon. On prend l’escalier de derrière !

Van Pelt hocha rapidement la tête et se précipita dans le couloir, suivie par sa supérieure.

L’étage était déjà presque désert, on aurait pu croire que l’immeuble avait été abandonné si cette alarme ne brisait pas le silence avec de plus en plus d’intensité.

La jeune agent poussa la porte coupe-feu et commença à dévaler les escaliers quand elle entendit un cri derrière elle.

- Grace !

Elle pivota et découvrit Lisbon paniquée, qui tirait de toutes ses forces un pan de son débardeur coincé entre les deux battants de la porte refermée.

Sans réfléchir, elle remonta aussitôt les quelques marches et tenta d’ouvrir mais la sécurité s’était enclenchée. La porte était bloquée. Elle tenta de la faire bouger, s’acharnant dessus mais rien ne changea.

Son regard remonta jusqu’au visage de la brunette et pour la première fois, elle put y voir une profonde détresse. Elles restèrent ainsi un instant, yeux dans les yeux, perdues, la sirène résonnant toujours partout autour.

Leur esprit sembla arriver à la même conclusion au même moment car la jeune recrue lui murmura d’un air désolé :

- On n’a pas le choix…

Lisbon hocha la tête, réticente, et se glissa hors de son débardeur, dévoilant son soutien-gorge bleuté.
Van Pelt attrapa son bras et l’encouragea à la suivre. Le temps pressait. Les deux femmes finir par s’élancer dans les escaliers, gênées comme jamais.

Quand elles se retrouvèrent enfin à l’extérieur, rejoignant l’air d’évacuation, l’agent senior tenta de se cacher du mieux qu’elle put derrière sa collègue mais ce qui devait arriver arriva :

- Lisbon ?

La voix de Jane dans son dos. Ses joues s’empourprèrent immédiatement et elle se retourna, croisant ses bras sur sa poitrine.

- Un seul commentaire et je t’envoie mon poing dans la figure, le menaça-t-elle.

Le consultant montra ses mains en signe d’innocence.

- Je peux quand même te proposer ça ? sourit-il en lui tendant sa veste.
- Merci, lâcha-t-elle en s’enroulant dans le vêtement.
- Je…
- Chut !

Jane n’insista pas. Il resta muet, se balançant sur ses jambes et jetant des coups d’œil malicieux à sa supérieure.

- Quoi ? finit-elle par demander.
- Je crois que je vais avoir sérieux un penchant pour les alertes aux explosifs maintenant…

Jane et Lisbon se promenait silencieusement sur la plage, appréciant les reflets dorés du soleil à l’horizon et la caresse du sable chaud sur leurs pieds nus avant de rentrer au bureau.

Soudain, la brunette aperçut un groupe de femmes installées sur leurs serviettes, qui chuchotaient en montrant discrètement le blondinet du doigt. Puis l’une d’elle finit par se lever et par se diriger vers les deux collègues.

Sans réfléchir, Teresa se rapprocha de son consultant et entrelaça leurs mains. L’inconnue s’arrêta aussitôt en grimaçant et entreprit un replie le plus naturel possible vers ses amies.

- Lisbon ?
- Une bande de groupies avait des projets sur toi, se justifia-t-elle.
- Et ? Tu es jalouse ? rigola-t-il.
- Absolument pas !

Elle lâcha brusquement sa main et s’écarta de nouveau.

- Teresa Lisbon est jalouse ! chantonna-t-il.
- Pas du tout. Je t’ai juste rendu un service, tu devrais me remercier, se défendit-elle en rougissant.
- Tu ne sais pas mentir !

Sans prévenir, Jane attrapa Lisbon par les jambes et la jeta sur son épaule.

- Hey ! Jaaane !

Le consultant courut vers l’immensité bleue, s’y enfonçant jusqu’aux genoux et ignorant royalement les protestations de sa partenaire.

- Jane ! Lâche-moi ! C’est un ordre !
- Puisque c’est un ordre… répondit-il en la faisant pivoter dans ses bras de façon à la placer tête en bas, juste au-dessus de la surface.

- Nooon !
- Il faut savoir ce qu’on veut, rigola-t-il. Alors ? Avoue que tu es jalouse et je te repose !
- Jamais de la vie !
- Bon…

Il la jeta dans l’eau avec un grand sourire. Quelques secondes plus tard, la jeune femme remonta à la surface avec un faux air énervé, trempée mais prête à prendre une revanche redoutable. Sauf que le blondinet ne bougeait plus, le regard fixe, les bras ballants.

- Jane ? dit-elle d’une voix hésitante.
- Hum ?

Il sembla sortir de son bug, reportant son attention sur elle. Elle inclina la tête, intriguée, puis jeta un coup d’œil à son chemisier… devenu complétement transparent.

- Oh, fit-elle en souriant et en croisant les bras sur sa poitrine.
- Quoi « oh » ?
- Tu n’étais pas du tout en train de me reluquer ?
- Absolument pas ! se défendit-il.
- Tu ne sais pas mentir…

Lisbon ouvrait la portière de sa voiture quand une vieille DS bleue se gara à côté d’elle.

- Tu vas où ? lui demanda Jane en descendant alors qu’elle s’installait au volant.

- J’ai des courses à faire.

Il hocha la tête.

- Je pense que j’ai un plan pour coincer Erica, on en parle quand tu reviens ?

- Ça marche.

Et il s’éloigna en direction de CBI. Elle rêvait ou Patrick Jane venait de croire à son mensonge ? En démarrant, elle se dit en souriant que ou il vieillissait ou elle commençait vraiment à faire des progrès.

Elle roula pendant près d’une demi-heure avant de s’arrêter devant un grand bâtiment où elle pénétra.

- Agent Lisbon ?

- Erica. Bonjour, la salua-t-elle d’une voix gênée.

- Qu’est-ce qu’il vous amène ? Du nouveau sur l’enquête ?

- Pas exactement. Je ne viens pas en tant que flic, je…

- Oh. Je vois. Je peux vous prendre dans dix minutes si vous voulez.

- Super.

Elle s’assit dans un fauteuil, contente de ne pas avoir à se perdre dans des explications compliquées.


- Vous venez ?

La jeune femme sortit brusquement de sa somnolence et regarda tout autour d’elle, se rappelant du lieu, avant de poser le regard sur la porte que tenait ce qui était à la base sa principale suspecte dans l’enquête en cours.

- J’arrive, désolée.

Elle entra dans une pièce aux lumières aveuglantes et s’assit sur le siège que lui montra Erica.

- C’est obligé la vidéo ?

- Oui, ça fait partie de notre système. Cela aidera vos âmes sœurs à se connecter à vous.

La brunette soupira, espérant que ça ne tomberait jamais entre de mauvaises mains – celles de Patrick Jane par exemple.

- Je vais vous posez une série de questions standards, vous êtes prête ? lui demanda Flynn de derrière la vitre.

Lisbon inspira un grand coup.

- Prête.

- Comment vos amis vous décrirez-t-ils ?

- Euh… travailleuse – un peu trop peut-être. Et souvent en colère aussi… mais attentive aux autres je suppose et capable de sacrifices pour ceux qui compte vraiment.

- Quel genre d’hommes vous intéresse ?

- Gentil, doux, attentionné… mais avec un côté drôle aussi, toujours prêt à vous remonter le moral, c’est important.

- Et physiquement ?

- Euh… aucune idée. Bien bâti, musclé. Avec des yeux dans lesquels on peut se plonger pendant des heures… enfin ça vire film à l’eau de rose là…

- Êtes-vous attirée par le côté sombre d’un homme ?

- C’est une partie d’un tout… alors oui, je pense même si ce n’est pas ce que je préfère. Mais les bisounours, c’est pas trop mon truc… j’aime ce qui reflète la vérité, la vraie vie, et un homme qui a un bagage derrière lui, bon ou mauvais.

[...]

- Dans un monde idéal, à quoi ressemblerait votre vie ?

- A pas grand-chose… répondit Lisbon qui avait repris confiance depuis un petit moment. Dans un monde idéal, il n’y aurait pas de crimes, donc pas de flics. Je n’aurais jamais rencontré ceux que j’ai rencontré et sans eux… je le répète, ma vie ne ressemblerait pas à grand-chose.

- Merci beaucoup, c’est terminé.

Lisbon se surpris presque à penser déjà ? Elle s’était prise au jeu, ses réponses étaient devenues de plus en plus naturelles, de plus en plus fluide, comme une évidence.

- Je crains ne pas pouvoir faire grand-chose pour vous, lui avoua Erica en la raccompagnant à la porte.

- Quoi ?

Tous ces efforts pour rien ?

- Vous venez de me faire le portrait exact de Patrick Jane.

Lisbon ouvrit la bouche… pour la refermer aussitôt. Non, pas ça, songea-t-elle. L’amour qu’elle avait pour Dieu était-il aussi peu réciproque ? Qui était l’imbécile qui avait dit que la foudre ne tombait jamais deux fois au même endroit ? Depuis son enfance, elle ne faisait que ça, se faire griller – dans les deux sens du terme.