Démons du passé^, Chapitre 7 en ligne

La nuit était humide, mais pas trop froide. L’homme marchait, les mains dans les poches, la tête enfoncée dans les épaules pour se protéger de la légère pluie qui tombait. Il n’avait pas si froid, il venait d’une région bien plus froide que celle-ci. Mais la pluie, dans son état de fatigue, ne l’aidait pas. Il marchait depuis plusieurs heures, sans vraiment savoir où il allait. La seule chose dont il était sûr c’est qu’il devait la trouver.

Il ne l’avait pas vue depuis plusieurs années, il ne savait même pas si elle accepterait de le voir. Lors de leur dernière rencontre, il lui avait reproché de ne jamais penser à sa famille, de faire passer son travail avant ses autres frères et lui. Il avait refusé de la revoir ensuite. Puis les années avaient passé, il avait changé et maintenant il se retrouvait seul.

Il avait tenté d’aller voir ses frères, mais comme à chaque fois ces quatre dernières années, ils avaient refusé de lui venir en aide. Tommy lui avait rappelé que la dernière fois, il avait faillit blesser Annie et qu’il ne prendrait pas de risque avec sa fille. Il ne pouvait pas vraiment lui en vouloir. S’il avait été à sa place, il aurait fait la même chose. Annie était une adorable jeune femme, brillante. Elle avait beaucoup changé depuis la dernière fois qu’il l’avait vue et il ne voulait pas gâcher son avenir.

James non plus n’avait pas voulut l’aider. Il voyait une femme et ne voulait pas risquer de la perdre à cause de lui. Alors il ne lui restait que sa sœur et il espérait vraiment qu’elle accepterait de le recevoir. Il s’en voulait de tout ce qu’il avait put lui dire au cours des années.
Elle avait toujours été là pour eux lorsqu’ils étaient enfants, après la mort de leur mère. Lorsque leur père s’était auto-détruit, lorsqu’il avait préféré l’alcool plutôt que le bien-être de ses enfants. Lorsqu’il était mort, elle avait mit un terme à ses études pour trouver un travail et s’occuper d’eux. Après un temps, elle avait pris des cours du soir et elle avait réussit dans la vie.

Bien qu’il ne lui ait jamais dit, il était fier d’elle. Teresa Lisbon, la fierté de la famille. Ses frères aussi étaient fiers d’elle, il n’en avait aucun doute. Tommy était le plus proche. Il savait qu’ils s’étaient revus quelques années plus tôt et qu’ils s’étaient quittés en bons termes. S’il n’avait pas été si têtu, il se serait vraiment rendu compte des efforts et des sacrifices de sa grande sœur.

Une bourrasque de vent le fit frissonner et il accéléra le pas. Il était tard et Teresa devait certainement être chez elle. Mais il ne connaissait pas son adresse. La dernière fois qu’il l’avait vue, elle vivait encore à San Francisco. Il avait refusé de la revoir et il s’en voulut. Maintenant, le seul moyen qu’il avait de la retrouver était de se rendre sur son lieu de travail. Elle n’allait pas aimer, mais il n’avait pas le choix.

Daniel tourna au coin de la rue et le grand bâtiment du CBI apparut devant lui. Il avança jusqu’à la barrière de l’entrée et un homme l’arrêta. L’agent de sécurité. Il s’arrêta et sortit ses papiers d’identité.

-“ Vous êtes de la famille de l’agent Lisbon ?” S’étonna l’agent de sécurité.
-“ Je suis son petit frère” répondit-il. “ Et je la cherche.”
-“ Je suis désolé mais l’agent Lisbon est rentrée chez elle” l’informa l’homme.

-“ Justement, je ne connais pas son adresse et je me demandais si quelqu’un pourrait m’aider.”
-“ Et bien, je ne sais pas si j’en ai le droit” hésita l’agent. “ Mais… Je peux faire une exception.”

Il sortit un stylo et un carnet, puis nota l’adresse. Il tendit le morceau de papier à Daniel Lisbon qui le prit avec un sourire reconnaissant. Ses mains étaient tremblantes, ce qui n’échappa pas au gardien.

-“ Vous voulez que je vous appel un taxi ?” Suggéra-t-il.
-“ C’est gentil mais… je n’ai pas d’argent pour le payer” répondit Daniel en baissant la tête.

Le gardien observa l’homme devant lui. Il était fatigué, les cernes sous ses yeux pouvaient en témoigner. Il avait froid, mais ses tremblements ne venaient pas de là. Il n’était pas flic, mais il n’était pas stupide. Il avait côtoyé tant de monde en travaillant ici, avait vu beaucoup de drogués, d’alcooliques. Et l’homme devant lui était indéniablement en manque de quelque chose. Il ne saurait pas dire quoi, mais il avait besoin d’aide.

Il plongea la main dans sa poche, en sortit son porte feuille dans lequel il chercha quelques billets. Il compta combien il avait, pas grand-chose, mais assez pour aider le frère de l’agent Lisbon. Il connaissait la femme, la respectait beaucoup. C’était le moins qu’il puisse faire pour aider l’agent qui avait aidé à la capture de tant de criminels.

-“ Prenez ça” dit-il en lui tendant les billets.
-“ Je… Non, je ne peux pas accepter” refusa Daniel.
-“ Vous me rembourserez plus tard, mais vous avez besoin d’aide et je peux vous aider, du moins pour le moment.”
-“ Je ne sais pas quand je pourrai vous rembourser” refusa encore une fois Daniel.
-“ Prenez le temps qu’il vous faudra, je n’en ai pas besoin pour le moment” sourit le gardien. “ Maintenant, attendez ici, je vous appelle un taxi.”

Les billets dans les mains, Daniel n’osait pas lever les yeux. Il ne connaissait pas ce gardien, il ne savait même pas pourquoi il l’aidait. Ça devait être à cause de sa sœur. Il se rendit alors compte qu’elle était respectée par beaucoup de monde et la culpabilité augmenta en lui.

Quelques minutes plus tard, un taxi se gara devant le bâtiment. Le gardien accompagna Daniel, donna l’adresse au chauffeur puis s’éloigna.

-“ Bonne chance monsieur Lisbon” dit-il avant de laissait partir le taxi.

Daniel posa sa tête contre la vitre, les yeux mi-clos. Il luttait contre la fatigue, contre le froid et surtout contre l’envie de boire. Il n’avait pas but une goutte en deux jours et il était fier. Mais ça devenait de plus en plus difficile. Il avait prit le même chemin que son père, ce chemin qui avait détruit sa famille tant d’années plus tôt.
Mais maintenant il voulait changer, il voulait s’en sortir. Il voulait retrouver sa vie d’avant et plus encore, il voulait retrouver sa famille. Ses frères ne voulaient pas l’aider, mais il pensait que sa sœur le ferait. Elle avait du cœur, elle aidait toujours ceux qu’elle pouvait. Elle ne pourrait pas refuser d’aider son propre frère.

Le taxi traversa la ville sans même qu’il ne s’en rende compte et bientôt, il s’arrêta devant un complexe. Il regarda à travers la vitre. Sa sœur vivait dans un endroit plutôt agréable. Il se demanda l’espace d’un instant si il avait le droit de débarquer dans sa vie comme ça, si il pouvait bouleverser sa vie. Mais elle était sa dernière chance.
Il sortit donc les billets que lui avait donné l’agent de sécurité et paya pour la course avant de sortir du taxi. Il avança doucement vers l’entrée du bâtiment. Il sortit le bout de papier que lui avait donné le gardien pour y trouver le numéro de l’appartement de sa sœur.

Daniel monta les quelques marches le séparant de l’entrée, trouva la bonne porte mais hésita au dernier moment. Il ne savait plus s’il voulait vraiment envahir la vie de sa sœur. Elle semblait s’en être bien sortie, exactement comme lui avait dit Tommy. Si jamais il frappait à la porte, si elle le voyait dans cet état, elle voudrait l’aider. Mais il savait que lorsqu’il était en manque, il pouvait devenir violent, qu’il pouvait être comme son père. Il savait qu’elle pouvait se défendre, mais il ne voulait pas s’en prendre à elle, même si ce n’était pas vraiment lui.

Il prit sa décision et se retourna. Il s’éloigna de l’appartement de sa sœur, refusant de lui imposer ses mauvais choix. Mais alors qu’il sortait du bâtiment, une porte s’ouvrit.

-“ Daniel ?” L’appela la voix de sa sœur et il s’arrêta.

Il n’osa pas se retourner. Il l’entendit s’approcher et poser une main sur son épaule. Il se retourna doucement, la tête basse.

-“ Daniel, regarde-moi” demanda-t-elle doucement.

Il hésita, puisa au fond de lui pour trouver le courage nécessaire. Il se retourna doucement, regardant toujours vers le sol. Il sentit la main de sa sœur sur sa joue, le forçant gentiment à lever les yeux. Il le fit enfin et ce qu’il vit lui réchauffa le cœur. Teresa lui souriait et ce n’était pas forcé.

-“ Viens à l’intérieur” lui dit-elle.
-“ Je ne voudrais pas m’imposer” argua-t-il, mais il n’était pas vraiment sincère.
-“ Allez viens, on va boire un café et discuter un peu” ajouta-t-elle en l’entrainant jusqu’à l’appartement. “ On a beaucoup de choses à se dire.”

Daniel suivit sa sœur sans plus discuter. Après tout, il était venu jusqu’ici, il ne pouvait plus reculer. Teresa ferma la porte derrière eux et se dirigea vers la cuisine. Daniel resta devant la porte, n’osant pas avancer dans l’appartement de sa sœur. Il n’était jamais venu ici. Il observa un peu ce qui se trouvait sur les étagères : des livres, des photos. Il attrapa un cadre dans lequel se trouvait une photo de ses frères et lui lorsqu’ils étaient enfants. Teresa avait prit elle-même cette photo, il s’en souvenait parfaitement. C’était peu de temps après la mort de leur père, à l’époque où Teresa avait obtenu leur garde.

Il reposa le cadre et en prit un autre. Sa sœur s’y trouvait avec un homme, mais elle ne semblait pas savoir qu’on la prenait en photo. Elle parlait à l’homme et ce dernier l’écoutait avec attention, un sourire sur le visage. Les yeux de l’homme étaient sur sa sœur, une sorte d’admiration pour elle. Il devait s’agir d’un très bon ami.

-“ C’est Patrick Jane” l’informa-t-elle en arrivant derrière lui. “ Il travail avec moi depuis un peu plus de dix ans.”
-“ Vous semblez bien vous entendre” commenta Daniel. “ Et il a l’air de beaucoup t’aimer.”
-“ C’est mon meilleur ami” affirma-t-elle avec un sourire attendri.

Daniel pouvait entendre dans sa voix à quel point elle appréciait son collègue, son ami. Il avait vraiment manqué beaucoup de choses dans la vie de sa sœur à cause de son comportement.
Teresa tira le bras de son frère pour qu’il la suive jusqu’au canapé. Ils s’y installèrent et burent en silence pendant quelques minutes. Daniel ne savait pas par quoi commencer. Il savait qu’il devrait lui dire à quel point il avait mal tourné, les bêtises qu’il avait faites ces dernières années. Mais il ne voulait pas, il avait honte.

-“ Tu peux tout me dire Daniel” le rassura Teresa, comme si elle avait lu dans ses pensées. “ Tu as des problèmes ?”
-“ Je… je n’ai plus d’appartement, plus de travail et je ne sais pas où aller” souffla-t-il. “ Mais tout ça est de ma faute je sais, mais j’ai envie de changer.”
-“ Tu bois” remarqua-t-elle. “ Inutile de le nier.”
-“ Je ne le nie pas. Et ça fait une semaine que je n’ai pas bu une goute” précisa Daniel en se tournant vers elle. “ Je veux vraiment changer, je veux redevenir comme avant.”
-“ Et je t’y aiderai,” assura-t-elle. “ Tu as fait le premier pas en venant me voir et je ne te laisserais pas tomber.”

Daniel sourit à sa sœur, mais au fond de lui il s’en voulait. Il ne lui disait pas tout, il ne pouvait pas. Comment le prendrait-elle s’il lui disait toute la vérité ? Elle savait qu’il était alcoolique, c’était bien suffisant. Et puis, en étant ici, loin de chez lui, personne ne pourrait le retrouver. Du moins il l’espérait.

-“ Viens, je vais te préparer la chambre d’amis” lui dit-elle en se levant du canapé. “ J’ai encore quelques vêtements que Tommy a oublié la dernière fois qu’il est venu.”

Elle avait des contacts avec Tommy. Il aurait dut en être heureux, mais il sentit une pointe de jalousie dans son cœur. Mais tout était de sa faute, il ne pouvait blâmer que lui.
Il suivit Teresa à l’étage, observant les lieux. La maison de sa sœur n’avait rien de très accueillant. Les seules photos qu’il avait vues se trouvaient sur l’étagère dans le salon. Il n’y en avait pas d’autre, sur les meubles ou les murs. Il avait remarqué des cartons dans le salon, preuve que sa sœur ne s’était pas totalement installée dans cet appartement. Il savait pourtant qu’elle y vivait depuis des années. Il ne savait pas pourquoi elle vivait ainsi, mais pour le moment ça n’avait pas d’importance.

Teresa le conduisit dans une pièce au fond du couloir et il y entra. La chambre d’amis était simple : un lit, une table de chevet, une commode. Pas de photos, pas de tableaux. Rien de personnel dans cette chambre. Elle le laissa s’installer et revint quelques minutes plus tard avec un tas de vêtements qu’elle lui donna.

-“ La salle de bain est dans le couloir, deuxième porte sur ta gauche” indiqua-t-elle. “ Je vais nous préparer quelque chose à manger pendant que tu te changes. Demain, je t’aiderai à mieux t’installer. Tu vas devoir suivre les réunions des alcooliques anonymes et je t’aiderai à trouver un travail.”
-“ Merci de me laisser rester Teresa,” remercia Daniel.
-“ Tu es mon frère et c’est mon devoir de te venir en aide” dit-elle. “ Et puis, c’est là l’occasion de se retrouver, d’apprendre à mieux se connaitre. On ne s’est pas vu depuis trop longtemps.”

Daniel ne dit rien. Il s’en voulut de profiter de sa sœur, mais il n’avait pas d’autre choix. Ses frères n’avaient pas voulut l’aider, sa sœur oui. De plus, elle vivait assez loin de chez lui, ce qui ne pouvait être qu’une bonne chose.

-“ Vas donc te laver pendant que je nous prépare quelque chose à manger.”

Elle quitta la chambre et Daniel se laissa tomber sur le lit. Teresa était flic, elle finirait par découvrir la vérité. Mais peut-être que d’ici là il aurait trouvé la solution à son problème. Il l’espérait vraiment.



Dans la cuisine, Lisbon réchauffait un plat de lasagnes. Elle n’en revenait pas, son frère Daniel qu’elle n’avait pas vu depuis si longtemps était de retour dans sa vie. Elle savait qu’elle n’avait pas été son premier choix, qu’il avait tenté de voir James et Tommy avant de se tourner vers elle. La dernière fois qu’elle l’avait vu, il lui avait reproché de ne penser qu’à elle et son travail. Ils ne s’étaient ni revu ni reparlé depuis.

Bien souvent elle s’était demandé ce qu’il devenait, s’il avait un travail, une famille. Maintenant elle savait que sa vie n’avait pas été rose. Il avait des problèmes d’alcool, tout comme leur père. Mais elle ne lui reprochait rien. Il avait certainement eut des problèmes le poussant à se tourner vers l’alcool. Elle ferait de son mieux pour lui venir en aide, pour qu’il retrouve une vie stable.

Lisbon plaça deux assiettes sur la table avant de sortir une bouteille d’eau. Elle avait l’habitude d’accompagner son repas d’un verre de vin, mais ce soir elle boirait de l’eau. Elle était si heureuse de voir son petit frère. Elle se souvenait encore des batailles qu’ils faisaient étant enfants, des jeux. Ils avaient été si heureux avant la mort de leur mère. Mais quand elle était partie, quand leur père avait commencé à boire, leurs vies avaient changé et pas pour le meilleur.

Elle avait fait de son mieux pour que ses frères ne manquent de rien, qu’ils aient toujours à manger sur la table, des vêtements propres. Elle avait également aidé son père comme elle le pouvait, mais ça n’avait pas suffit. Il avait finit par mettre fin à ses jours, les laissant, ses frères et elle seuls. Et à partir de là, tout avait de nouveau changé. Elle avait dut mettre fin à ses études pour travailler. Elle ne voulait pas qu’on puisse la séparer de la seule famille qu’elle avait encore.

Mais une fois plus grands, ses frères avaient prit leur envol. Après ça, elle avait déménagé, intégré la police et avait fait carrière. Elle s’était construit une vie, s’était fait des amis. Elle savait qu’elle n’avait pas tout ce dont elle rêvait étant enfant, mais elle n’avait pas à se plaindre. La seule chose qui lui manquait pour que tout soit parfait était d’avoir ses frères dans sa vie. Elle voyait James et Tommy de temps en temps, bien que pas assez souvent. Quand à Daniel, il avait refusé de la revoir après avoir quitté la maison.

Elle entendit son frère sortir de la salle de bain pour se rendre dans sa chambre. Un sourire étira ses lèvres. Son petit frère était à la maison. C’était peut-être stupide de réagir ainsi pour ça, mais ça avait tellement d’importance pour elle.
Daniel descendit l’escalier et Teresa ne put réprimer un sourire. Les vêtements de Tommy étaient un peu trop petits pour lui. Elle allait devoir lui en trouver d’autres dans la journée.

-“ Merci Teresa” dit soudain Daniel.
-“ De quoi ?”
-“ De bien vouloir m’héberger, de bien vouloir m’aider” expliqua-t-il. “ Je sais que je n’ai pas toujours été tendre avec toi, que je t’ai reproché beaucoup de choses. Et je m’en veux.”
-“ C’est du passé Daniel” le coupa-t-elle. “ Nous pouvons repartir de zéro aujourd’hui et retrouver cette complicité que nous avions il y a longtemps.”
-“ C’est-ce que je voudrais” avoua-t-il. “ Je ferai de mon mieux pour changer, pour redevenir quelqu’un de bien.”
-“ Tu es quelqu’un de bien, tu as juste fais de mauvais choix. Maintenant tu vas pouvoir reprendre ta vie en main, te trouver un travail.”
-“ Tu sembles bien confiante.”
-“ Je le suis. Tu vas y arriver Daniel et je serai là pour t’y aider. Maintenant mange. Je dois me lever tôt demain et je ne voudrais pas me coucher trop tard.”
-“ Oui maman” sourit Daniel avant de rapidement finir son plat de lasagnes.

Lisbon sourit à la réponse de son frère. Il l’appelait souvent ainsi lorsqu’ils étaient enfants. Elle s’était toujours montrée une grande sœur attentive, même avant la mort de leur mère. Elle était comme ça, elle ne pouvait rien y faire.
Elle finit son assiette, rangea la cuisine avec l’aide de son frère puis ils montèrent se coucher. Elle l’embrassa sur la joue avant d’aller s’enfermer dans sa chambre.
Elle était heureuse d’avoir Daniel ici. Ce dont elle ne se doutait pas, c’est qu’il n’était pas aussi sincère qu’elle le pensait. Elle qui croyait venir en aide à son petit frère, se rendrait bien vite compte de tout les problèmes qu’il avait apporté avec lui.

La nuit avait été courte pour Lisbon. Elle avait eut du mal à s’endormir, les images du passé revenant la hanter. Elle avait revu son père à une époque sombre de sa vie, rongé par la peine. Elle s’était revue enfant, tentant de l’aider de son mieux, de lui redonner la joie de vivre. Mais qu’importe ce qu’elle avait put faire, rien n’avait jamais suffit. Il les avait fait souffrir, les avait battus, fait pleurer.

Elle avait pourtant aimé son père, jusqu’au bout. Avant tout ça il les aimait, de tout son coeur, elle n’avait aucun doute. La mort de sa femme l'avait détruit et il n’avait put s’en remettre. Même la présence de ses enfants ne l’avait pas aidé. C’était tout le contraire d’ailleurs. De voir ses quatre enfants chaque jour n’avait fait qu’augmenter sa peine.

Teresa avait alors prit la charge de ses frères et avait tout fait pour qu’ils soient heureux. Elle avait fait en sorte qu’ils aillent à l’école, qu’ils fassent leurs devoirs. Elle s’était assurée de leurs bonnes fréquentations, même s’il n’était pas facile de toujours surveiller les amis de trois garçons. Elle ne voulait pas qu’ils fassent les mauvais choix, même si elle ne pouvait décider pour eux.

Lorsqu’elle les avait quittés, elle avait sut qu’ils lui en voudraient. Mais elle n’avait pas imaginé que Daniel couperait tous liens avec elle. Il avait toujours été le plus difficile de ses frères, avec le caractère le plus dur. Elle avait tenté de canaliser son énergie dans des activités sportives, mais il finissait toujours par se battre et se faire renvoyer. Elle avait finit par abandonner, même si ça lui faisait mal au cœur.

Daniel, qui avait passé son temps à lui reprocher de trop le surveiller, lui avait alors reproché de le laisser tomber. Elle avait pensé que ça lui passerait avec le temps, qu’il finirait par comprendre qu’elle ne voulait que son bien. S’il ne voulait pas de son aide, elle ne l’aiderait pas. Et le jour où il aurait besoin d’elle, il saurait où la trouver.

Hier soir, lorsqu’il était arrivé devant sa porte, elle y avait vu sa chance de retrouver son petit frère. Il avait tellement changé depuis la dernière fois où elle l’avait vu. Il avait sombré, tout comme leur père. Qu’importe, pour elle il restait son frère et il avait besoin d’elle. Alors elle l’aiderait de son mieux.

Voilà pourquoi elle avait eut tant de mal à dormir. Elle avait écouté Daniel lui expliquer ses problèmes, ne le jugeant pas. Mais à la fin de son récit, malgré son regard qu’il voulait sincère, elle savait qu’il ne lui disait pas tout. Elle n’était pas devenue flic pour rien, elle savait reconnaître un menteur. Elle n’était peut-être pas aussi douée que Patrick Jane dans ce domaine, mais elle n’était pas mauvaise non plus.

Daniel avait fait plus que sombrer dans l’alcool. Il avait des dettes de jeux, il devait certainement plus qu’elle ne pourrait l’aider à rembourser. Son salaire de flic lui permettait de subvenir à ses besoins et même à épargner un peu d’argent. Toutefois, elle n’avait pas économisé beaucoup et elle doutait de pouvoir payer toutes ses dettes.

L’alarme de son réveil l’informa qu’il était temps qu’elle se lève, même si elle serait bien restée un peu plus longtemps au lit. Elle devait se rendre au travail et surtout, faire en sorte que Jane ne lui pose aucune question. Elle le connaissait assez pour savoir que les cernes sous ses yeux ne passeraient pas inaperçues. Il avait l’œil partout, elle ne pouvait jamais rien lui cacher.

Elle se rendit dans la salle de bain où elle prit sa douche. L’eau chaude lui fit du bien, délassant ses muscles tendus et la réveillant un peu. Il ne lui manquait plus que son café pour se réveiller complètement. Elle sortit de la douche, s’enveloppa dans une serviette et se rendit dans sa chambre pour s’habiller. Comme chaque jour, elle choisit une tenue simple : pantalon noir, chemise beige sous une veste noire. Elle décida de laisser ses cheveux libres et retombant dans son dos.

Lorsqu’elle enfila ses bottines, elle entendit du bruit en bas provenant de la cuisine. Daniel était réveillé. Elle sortit de la chambre et descendit l’escalier. Une bonne odeur lui parvint aux narines et elle sourit. Du café. Elle arriva dans la cuisine et crut avoir vu un fantôme. Daniel était le portrait parfait de leur père : grand, brun, les cheveux en batailles, mal habillé. Il avait toujours était celui qui ressemblait le plus à leur père lorsqu’il était enfant. Elle n’avait pas fait attention hier soir, bien trop fatiguée par une longue journée de travail. Mais ce matin elle le voyait.

L’agent chassa ces pensées de son esprit et entra dans la cuisine. Daniel se retourna avec un immense sourire sur le visage, une tasse à la main. Elle la prit avant de s’installer au comptoir. Elle huma le doux parfum de sa boisson favorite, porta la tasse à ses lèvres et en but une gorgée. Elle avala difficilement et leva les yeux vers son frère.

-“ Trop de sucre, désolé” s’excusa Daniel. “ J’oublie toujours que je suis le seul à mettre autant de sucre dans mon café.”

-“ C’est rien” le rassura-t-elle.

-“ Donne, je t’en fais un autre” proposa le jeune homme.

-“ Inutile, j’en achèterai un en route” dit-elle en se levant. “ Je vais être absente toute la journée, tu vas donc être seul. Mais je vais m’arranger pour être de repos demain, si toutefois je n’ai pas d’affaire qui arrive avant la fin de la journée.”

-“ Tu n’es pas obligée Teresa” protesta son frère. “ Je peux m’occuper tout seul.”

-“ Je t’ai dis que je t’aiderai et c’est-ce que je vais faire” rappela Lisbon. “ Donc aujourd’hui tu vas te trouver une occupation, peut-être que tu pourrais essayer de voir les alcooliques anonymes.”

-“ Je…” hésita Daniel, mais face au regard que lui envoyait sa sœur, il hocha la tête.

Lisbon s’approcha de son frère, se mit sur la pointe des pieds et lui embrassa la joue. Elle le sentit se raidir, surprit, puis se détendre. Il posa une main hésitante dans son dos, la serra doucement puis la laissa s’écarter.

-“ Je t’appellerai vers midi, fais en sorte d’être là” dit-elle, puis elle plongea la main dans sa poche pour en sortir une clé qu’elle lui donna. “ Voici le double de la clé de l’appartement.”

-“ Tu es certaine que…”

-“ Si tu dois vivre avec moi, même temporairement, tu vas en avoir besoin.”

-“ Très bien” acquiesça-t-il. “ Passe une bonne journée Teresa.”

-“ Toi aussi Daniel. On se voit ce soir.”

Puis Lisbon quitta l’appartement, laissant son frère seul. Elle savait qu’il ne ferait pas de bêtises, du moins pas aujourd’hui. Il était venu la voir pour qu’elle l’aide, il ne prendrait pas le risque de tout gâcher tout de suite. Elle savait qu’il en ferait au moins une, il ne parviendrait pas à se contrôler. Il avait toujours été ainsi, et elle le savait.

Tandis qu’elle montait dans sa voiture, Lisbon se demanda combien de temps il tiendrait sans boire une goutte d’alcool. Son père avait essayé, mais n’avait pas réussi. Elle espérait qu’il en serait autrement pour Daniel, qu’il serait plus fort que leur père.




Jane somnolait sur le canapé du bureau de Lisbon depuis un peu plus d’une heure maintenant. Il avait passé la nuit ici, au CBI. Depuis la mort de son ennemi, les choses avaient beaucoup changé. Mais certaines choses ne changeaient pas, comme le fait qu’il passe ses nuits dans le grenier du CBI ou qu’il vienne faire une sieste sur le canapé de Lisbon.
Il aimait venir ici, il se sentait bien, en sécurité. Lisbon avait été à ses côtés depuis le début, même s’il lui avait souvent mentit et lui avait fait du mal. Il se demandait souvent pourquoi elle ne l’avait pas tout simplement abandonné. Mais il lui en était reconnaissant.

Personne n’était encore arrivé, il était seul. Raison pour laquelle il était venu s’installer ici. Lisbon serait la première à arriver, comme chaque jour et il voulait lui parler. Il était passé à son appartement la veille au soir, mais n’était pas resté en voyant qu’elle avait de la visite. Il était curieux de savoir qui était cet homme à venir aussi tard chez elle. Il n’avait pas vu son visage, l’homme était de dos lorsqu’il était arrivé.

Mais sa curiosité n’était pas la raison pour laquelle il voulait la voir. Non, en réalité il avait besoin de lui parler de leur dernière affaire. Il avait vu à quel point elle avait été difficile pour Lisbon, même si elle avait fait de son mieux pour le dissimuler. Lui l’avait vu, mais il n’était pas n’importe qui. Lisbon et lui travaillaient ensemble depuis si longtemps, pas loin de douze ans. Il pouvait reconnaître chaque expression de son visage, chaque mouvement de son corps.

Lors de leur dernière affaire, il avait vu que Lisbon avait été touchée par cette jeune femme, Vanessa Swanson, et sa petite fille Jenna. La pauvre femme, âgée de seulement dix neuf ans, avait été le seul témoin du meurtre du gérant du motel dans lequel elle logeait avec sa fille. Tout d’abord, elle avait nié avoir vu quoi que ce soit. Mais avec un peu de persuasion et de gentillesse, ainsi qu’une promesse de protection, elle avait finit par parler.


Une semaine plus tôt, un homme était venu parler à Oliver Sandoval, le gérant du motel. Elle les avait entendu crier, l’homme menaçant Oliver de lui faire payer. Quoi? Elle n’en avait aucune idée. Mais le lendemain, l’homme était revenu, armé et avait tué Oliver. Elle se trouvait à l’arrière du bâtiment quand il était arrivé et lorsqu’elle avait entendu le coup de feu, elle était arrivée en courant. Elle s’était cachée lorsque l’homme avait rejoint sa voiture et une fois qu’il fut loin, elle était entrée pour trouver le gérant mort derrière son bureau.

Lisbon avait fait rechercher l’homme en question d’après le portrait robot qu’avait fait Vanessa. Il avait été appréhendé à la frontière de l’état avec le Nevada. Il s’agissait de Pedro Almirez, trafiquant de drogue. Il avait bien entendu résisté, blessant un jeune officier qui avait tenté de le retenir. Le jeune homme avait été conduit à l’hôpital, mais sa vie n’était pas en danger.
Lisbon avait mené elle-même l’interrogatoire et, sous l’insistance de Jane, elle avait accepté qu’il vienne avec elle. Au début elle n’avait pas voulut, prétextant que l’homme était bien trop dangereux. Mais finalement, elle avait été rassuré qu’il soit avec elle, car l’homme lui donnait des frissons.

Vanessa avait été mise sous protection policière avec sa petite fille en attendant le procès. Lisbon s’en était assurée elle-même. Elle avait été touchée par cette jeune femme qui n’avait personne d’autre dans sa vie que sa petite fille de trois ans. Sa famille l’avait rejeté lorsqu’elle était tombée enceinte à l’âge de seize ans. Elle avait fait de son mieux pour s’en sortir, même si ce n’était pas facile.
Lisbon aurait voulut pouvoir faire plus pour elle, l’aider à trouver un endroit où elle pourrait commencer une nouvelle vie. Mais elle ne pouvait rien faire de plus. Ce que Jane ne savait pas, c’est qu’elle avait contacté une amie au service social qui avait promit de s’occuper de la jeune femme.

Lisbon était une femme de cœur, et la situation de cette jeune femme l’avait vraiment touchée. Lui aussi d’ailleurs. Cette fille avait été abandonné par les siens parce qu’elle avait commis une erreur de jeunesse et qu’elle avait voulut assumer ses responsabilités. A la place de ses parents, il aurait été fier. Elle était jeune, avait toute la vie devant elle. Elle aurait put faire adopter son bébé, et reprendre sa vie. Mais elle avait préféré garder sa fille et l’élever. Maintenant, elle allait recevoir l’aide que ses parents auraient dut lui offrir au lieu de l’abandonner.

Du bruit dans le couloir sortit Jane de ses pensées et il se redressa avant que Lisbon n’entre dans le bureau. Lorsqu’elle le vit, elle ne parut même pas surprise.

-“ Bonjour Lisbon” salua Jane.

-“ Bonjour Jane.” répondit-elle en posant sa veste et son sac sur son bureau avant de marcher jusqu’au canapé où elle s’assit.

“ Tu as bien dormi? Tu semble fatiguée” remarqua-t-il.

“ Pas vraiment” lui répondit-elle honnêtement. “ Mais ça va.”

Jane hésita un moment, ne sachant pas si c’était le bon moment pour poser sa question. Il ne voulait pas mettre Lisbon mal à l’aise. Cela ne l’avait jamais dérangé avant. Il ne s’embarrassait pas de ce que les gens pouvaient penser ou ressentir, du moment qu’il obtenait ce qu’il voulait. Même si avec Lisbon il avait toujours fait un peu plus attention qu’avec les autres, ça ne l’avait pourtant jamais arrêté.

Mais les choses avaient changé, il avait changé. Depuis que son ennemi n’était plus une menace, il ne semblait plus si effrayé de s’attacher aux gens. Lisbon ne s’en plaignait pas, bien au contraire. Elle aimait cette nouvelle complicité entre eux, cette nouvelle liberté. Ils pouvaient se parler, mais aussi se toucher s’ils en avaient envie. Par le passé, Lisbon avait souvent eut envie de lui prendre la main pour le rassurer, le consoler lorsqu’il n’allait pas bien. Maintenant elle le pouvait et ne s’en privait pas.

Voyant que son ami se sentait gêné par quelque chose, elle lui attrapa la main, lui faisant ainsi tourner les yeux vers elle. Il plongea son regard dans le sien, y trouvant le courage nécessaire pour poser sa question.

-“ Qui était l’homme chez toi hier soir ?” Questionna-t-il.

-“ Comment sais-tu… Question stupide” souffla-t-elle. “ Pourquoi es-tu venu hier soir ?”

-“ Je venais voir si ça allait” expliqua-t-il. “ Après cette dernière affaire, j’ai bien vu que tu n’allais pas bien.”

-“ C’est gentil Jane” remercia-t-elle. “ Mais tu n’étais pas obligé de venir. J’avoue que cette jeune fille m’a beaucoup touché et j’avais envie de lui venir en aide.”

-“ Moi aussi” avoua-t-il. “ Je ne comprends pas comment des parents peuvent rejeter leur enfant pour une erreur de jeunesse, même si cela conduit à la naissance d’un enfant.”

-“ Moi non plus je ne comprends pas” souffla Lisbon. “ Je trouve qu’elle a beaucoup de courage, même si elle a besoin d’aide.”

-“ Et je suppose que tu veux l’aider ?” Commenta Jane.

-“ C’est déjà fait” sourit Lisbon. “ Une de mes amies travail au service social. Je lui ais demandé si elle pouvait la prendre en charge avec sa fille. Ça ne sera pas facile, mais elle devrait s’en sortir.”

-“ Sainte Teresa” dit alors Jane, s’attirant un coup sur l’épaule de la part de Lisbon.

Le silence retomba avant que Lisbon ne se lève du canapé pour aller s’asseoir derrière son bureau. Elle devait encore relire les rapports de Cho, Rigsby et Van Pelt avant de pouvoir clore définitivement l’affaire. Elle ne fit plus attention à Jane qui n’avait pas eut sa réponse. Mais il n’insista pas. Il se leva, lança un dernier regard à Lisbon puis quitta son bureau.




Daniel avait mis un peu d’ordre dans l’appartement de sa sœur. Pas que ce n’était pas rangé, mais il avait besoin de s’occuper. Il avait tout d’abord rangé dans la chambre d’ami, la pièce où il allait loger pour les semaines à venir. Il voulait s’y sentir chez lui et avait donc changé un peu la position des meubles. Il avait bien comprit que pour sa sœur, cette pièce était surtout utilisée pour stocker ce dont elle n’avait pas besoin. Ne sachant pas quoi faire avec toutes les choses qui s’y trouvait, il avait tout réunit dans un coin de la pièce. Il demanderait ce soir à Teresa ce qu’elle voulait en faire.

Ensuite, il avait fait un peu de ménage dans le salon, ou plutôt dans les disques et DVD de sa sœur. Elle allait rouspéter ce soir en rentrant. Il savait qu’elle n’aimait pas qu’on touche à ses affaires, mais il devait bien s’occuper. Il avait remarqué qu’elle avait toujours des goûts très différents des siens. Il avait sourit en voyant qu’elle avait un CD des Spice Girls. Il ne se doutait pas que Teresa puisse écouter ce genre de musique.

Une fois fait, il se dirigea vers la cuisine. Il savait que sa sœur n’aimait pas cuisiner, même si elle l’avait fait pendant des années pour lui et ses deux frères. C’était surtout pour cette raison qu’elle n’aimait pas cuisiner. Il se souvenait qu’avant de partir pour l’école de police, elle se contentait de plats surgelés ou à emporter. Il ne pouvait le lui reprocher. S’il avait été à sa place, il en aurait été de même pour lui. Mais au contraire de Teresa, il aimait cuisiner et s’il trouvait un peu d’argent dans l’appartement, alors il pourrait aller acheter de quoi lui préparer un bon repas ce soir.

L’homme entra dans la cuisine et commença à fouiller dans les placards. Lorsqu’il était enfant, Teresa avait prit l’habitude de cacher un pot contenant de l’argent dans le placard, sur l’étagère la plus haute afin que lui ou les autres ne le trouve pas. En grandissant, il avait finit par découvrir cette cachette et s’était bien souvent servit dans le pot pour s’acheter de quoi boire avec ses copains ou tout simplement des magazines.

Il ouvrit le placard et trouva sur la plus haute étagère un pot qu’il reconnut tout de suite. Même après tant d’années, elle l’avait gardé. Il le prit entre les mains mais se figea. Son regard fut attiré par quelque chose qu’il ne s’attendait pas à trouver chez sa sœur. Elle avait passé tellement d’années à aider son père, à le supplier de cesser de boire qu’il ne pensait pas trouver de l’alcool chez elle.

Il fut tenté de prendre la bouteille qui semblait être déjà entamée. Sa main le démangeait de la prendre. Il ne pouvait pas, il n’avait pas but une goutte de la semaine. Il avait promit à sa sœur qu’il ne boirait plus. Il ne pouvait pas faire ça. Il ne devait pas. Mais sa main attrapa la bouteille comme si elle avait sa propre volonté. Il l’ouvrit et avala une gorgée qui lui brûla la gorge. Il ferma les yeux de contentement avant de prendre une autre gorgée, puis encore une autre. Mais lorsqu’il allait en prendre encore une, il repoussa la bouteille et la reposa brutalement dans le placard.

Daniel attrapa le pot contenant l’argent de sa sœur, prit une poignée de billets puis le reposa dans le placard. Il sortit précipitamment de la cuisine et monta à sa chambre. Il attrapa sa veste, la clé que lui avait donnée sa sœur puis redescendit. Il quitta l’appartement. Il ne savait pas où aller, mais il voulait s’éloigner de la tentation. Il ne pouvait pas prendre le risque de replonger, pas alors qu’il avait une chance de se sortir de là. Sa sœur avait confiance en lui, elle était la seule à lui avoir donné une seconde chance. Ses frères ne l’avaient pas fait, n’avaient pas voulut le faire.

Il marcha sans but pendant plus d’une heure, réfléchissant. Teresa avait raison, il devait s’inscrire aux alcooliques anonymes. Là, il pourrait recevoir l’aide dont il avait besoin. Ces gens le comprendraient, mieux que ne pouvait le faire sa sœur. Elle savait ce qu’était de vivre avec un alcoolique, pas d’en être un. Et même avec toute sa bonne volonté, elle ne pourrait jamais le comprendre.

Il ferait tout pour changer. Il voulait changer, plus que tout au monde. Il voulait redevenir le frère que Teresa aimait. Il avait passé bien trop d’années à lui faire des reproches non justifiés. Elle avait toujours fait en sorte que lui et ses frères soient heureux et en bonne santé. Elle avait agit comme une mère plus qu’une sœur. Il était jeune quand leur mère était morte, bien trop jeune pour tout comprendre. Et en grandissant, il s’était renfermé, s’était durci le cœur.

Il regrettait ses actions mais ne pouvait pas changer le passé. Il pouvait néanmoins faire en sorte que l’avenir soit meilleur. C’est-ce qu’il pensait pouvoir réussir en venant ici. Non seulement il pouvait se rapprocher de sa sœur, mais aussi prendre un nouveau départ. Et puis ici, personne ne le trouverait. Il était en sécurité, du moins l’espérait-il. Jack ne pouvait pas le trouver ici, de l’autre côté du pays. Qui se douterait qu’il aurait fait tout ce chemin jusqu’en Californie? Personne.

Lorsqu’il avait rencontré Jack, il n’avait pas imaginé que les choses tourneraient aussi mal. L’homme semblait sympathique, amical. Il le comprenait, ne le jugeait pas pour son penchant pour l’alcool. Il s’était joint au groupe, se sentant à l’aise au milieu de ces hommes. Ils étaient rapidement devenus amis et Daniel passait le plus clair de son temps avec eux. Puis, après un certain temps, Jack l’avait invité à se joindre à eux pour des parties de poker.

Teresa lui avait apprit à jouer lorsqu’il était plus jeune, tout comme elle l’avait apprit à James et Tommy. Il pensait être doué, il battait toujours ses frères et parvenait même à battre Teresa parfois. Mais il ne l’était pas autant qu’il le pensait et avait perdu beaucoup d’argent. Il avait tenté de rembourser en se proposant comme homme de main de Jack. Pas mal de gens lui devaient de l’argent et son travail était de le leur réclamer. Lorsqu’ils refusaient, il leur faisait peur. Ça marchait la plupart du temps, mais pas toujours.

Et c’est ça qui l’avait conduit à Sacramento. Le dernier à qui il avait rendu visite avait refusé de payer, comme beaucoup avant lui. Mais à l’inverse des autres, il avait proposé quelque chose pour rembourser sa dette, tout en l’aidant à rembourser la sienne. Daniel, bien que réticent au début, avait finit par accepter son offre. Et c’est là que les problèmes avaient vraiment commencé.

Il n’en avait pas parlé à Teresa, ne voulant pas la mêler à tout ça. Il voulait juste retrouver une vie normale, tout en se cachant de Jack et ses hommes. Jamais Jack ne penserait qu’il ait put se cacher chez un flic. Il était en sécurité chez sa sœur. Il ne comptait pas rester ici éternellement, juste assez pour retomber sur ses pieds. Ensuite, il partirait et se referait une vie ailleurs. Du moins, il l’espérait. Mais ce qu’il espérait plus que tout était que Teresa ne découvre jamais ce qu’il avait fait. Qu’il soit ou non son frère, il savait que sa sœur ferait passer la loi avant lui.

Il ferait tout pour qu’elle ne sache jamais à quel point il était tombé bas.




Les heures avaient passé. Cho, Rigsby et Van Pelt étaient arrivés peu après que Jane eut quitté le bureau de Lisbon. Cho était venu saluer l’agent et lui expliquer qu’il avait reçu un appel la veille au soir, peu après que tout le monde soit partit. Une assistante sociale, l’amie de Lisbon, avait appelé pour l’informer qu’elle avait retrouvé une tante éloignée de la jeune Veronica Swanson. La femme avait accepté de prendre sa nièce ainsi que sa petite Jenna chez elle une fois qu’elle ne serait plus en danger.

Cette nouvelle avait ravie Lisbon. Le destin était enfin clément envers la jeune fille, elle allait enfin être aimée d’au moins une personne dans sa famille. Lisbon avait remercié son collègue et lui avait demandé d’en informer Jane. Elle se doutait que cette nouvelle le ravirait aussi. Elle lui avait également demandé de travailler sur leur dernière affaire, ainsi que les autres en attendant d’être appelé pour une enquête. Elle voulait que tout soit en ordre pour le procès.

Cho avaient ensuite quitté son bureau et elle s’était retrouvée seule. Malgré sa fatigue, Lisbon parvint à rattraper le retard qu’elle avait dans ses rapports. Elle y avait passé une bonne partie de la matinée après, ne prenant même pas la peine de quitter son bureau pour se préparer son café. Une chance pour elle, Jane y avait pensé. Il était venu environ vingt minutes plus tôt avec une tasse fumante qu’elle avait prise avec joie. Mais contrairement à son habitude, il n’était pas resté dans son bureau, ce qui l’intriguait un peu.

Jane s’imposait toujours, même quand elle le menaçait de lui envoyer son agrafeuse à la figure. En général, ça ne lui faisait pas peur mais au contraire, le faisait rire. Mais aujourd’hui, il semblait perturbé et elle aurait bien aimé savoir par quoi. Elle n’aimait pas le voir ainsi, ça l’inquiétait. Jane avait changé, était plus ouvert. Mais là, il semblait se renfermer.

Elle se souvint de leur conversation ce matin. Ils avaient parlé de Veronica Swanson, cette fille qui les avait touché tout les deux. Elle l’avait vu avec la fille de Veronica, des étoiles dans ses yeux lorsqu’il tenait la petite fille dans ses bras. Il aimait les enfants, ce n’était un secret pour personne. Et la petite Jenna était un ange avec un sourire rayonnant. Jane avait passé beaucoup de temps avec elle, pendant que l’agent parlait avec sa mère.

Lorsqu’il avait rendu la fillette à Veronica, Lisbon avait bien vu la tristesse dans son regard, même s’il avait tenté de la cacher. Sa fille lui manquait et il le ressentait un peu plus à chaque fois qu’il voyait une petite fille. Elle pouvait le comprendre, elle ressentait la même chose parfois lorsqu’elle voyait une mère de famille avec sa fille. Le passé venait souvent vous hanter.

Elle leva les yeux de son ordinateur et remarqua Jane, assit sur son canapé, sa tasse à la main. Il semblait perdu dans ses pensées, tout comme elle un peu plus tôt. Elle serait bien allée le voir, mais lorsqu’elle regarda l’heure à sa montre, elle remarqua qu’il était temps qu’elle appelle son frère. Elle sourit à cette pensée. Son petit frère était de retour dans sa vie et elle ne pouvait être plus heureuse.

Elle attrapa son téléphone et composa le numéro de son appartement. Elle attendit un peu, mais Daniel ne répondit pas et elle tomba sur la boite vocale. Elle raccrocha, son sourire disparut. Mais où était-il ? Elle l’avait prévenu de son appel, il devait être à la maison à ce moment là. Peut-être était-il sortit. Elle lui poserait la question ce soir.

Alors qu’elle s’apprêtait à se lever, la porte de son bureau s’ouvrit et Jane entra. Il contourna le bureau, lui attrapa la main et l’aida à se lever. Elle leva vers lui un regard interrogateur, mais se laissa néanmoins faire. Il prit sa veste, l’aida à l’enfiler et la dirigea vers la sortit.

-“ Jane, où m’emmènes tu ?” Demanda l’agent tout en suivant son collègue.

-“ Je t’emmène manger” répondit-il. “ Tu as passé la matinée dans ton bureau, et si je n’étais pas venu t’apporter ton café, tu te serais certainement endormie.”

-“ Mais j’ai du travail qui m’attend” protesta-t-elle.

-“ Cho peut s’en occuper, n’est-ce pas Cho ?” demanda t-il à l’agent asiatique en passant à côté de son bureau.”

-“ On s’occupe de tout boss” confirma l’agent. “ Prenez donc une pause, vous en avez bien besoin.”

-“ Mais…” Lisbon s’arrêta en voyant le regard suppliant du consultant.

Elle le suivit sans un mot jusqu’à l’ascenseur. A sa grande surprise, au lieu de monter à la cafétéria, ils descendirent et Jane l’entraîna de l’autre côté de la rue. Il y avait un petit café un peu plus loin où Lisbon aimait se rendre. Jane le savait, comme il connaissait tout ses secrets. Ils s’installèrent dans une table au fond.

Lisbon posa les yeux sur son collègue tandis qu’il regardait le menu, même s’il devait certainement le connaître. Il semblait moins perturbé qu’un peu plus tôt, ce qui la rassura. Elle attrapa son menu et commença à le lire. Mais elle n’arrivait pas à se concentrer sur les lignes sous ses yeux. Son esprit ne cessait de partir vers son frère et elle sentit son inquiétude augmenter. Où pouvait-il bien être? Elle espérait vraiment qu’il ne soit pas allé dans un bar. Il avait dit ne pas avoir but depuis une semaine, mais elle savait comme la tentation était grande.

Elle sentit une main sur son avant bras et elle leva les yeux vers Jane qui lui sourit gentiment. Elle lui rendit son sourire, reconnaissante de son soutien silencieux. Elle se replongea dans le menu et lorsque la serveuse arriva, comme à son habitude, Jane commanda pour elle. Mais contrairement à son habitude, elle ne lui dit rien et attendit que la femme se soit éloignée pour enfin prendre la parole.

-“ Tu vas me dire ce qui ne va pas Jane ?” Demanda-t-elle gentiment.

-“ Mais tout va bien Lisbon” affirma-t-il. “ Mais tu avais l’air d’avoir besoin d’une pause, alors je me suis dis que ce serait bien d’aller manger.”

-“ C’est vraiment gentil de ta part, mais j’ai beaucoup de travail.”

-“ Tu as rattrapé tout ton retard et tu n’as pas eu un seul rapport de plainte contre moi” dit-il. “ De plus, j’ai vu que tu n’allais pas bien après avoir raccroché ton téléphone.”

-“ Tu m’espionnes maintenant ?” S’indigna-t-elle.

-“ Non, je ne t’espionne pas” se défendit Jane. “ Je m’inquiète, c’est tout.”

-“ C’est inutile.”

-“ Lisbon, nous sommes amis depuis longtemps, tu devrais savoir qu’il est inutile de tenter de me mentir. Alors dis-moi ce qui te tracasse.”

Lisbon le regarda dans les yeux pour voir à quel point il était vraiment inquiet. Elle avait toujours préféré garder sa vie personnelle pour elle, mais face à l’inquiétude de son collègue, elle se dit que pour une fois elle pourrait bien faire une exception. De plus, ça lui ferait du bien de parler à quelqu’un et Jane était un très bon ami.

Elle prit une profonde inspiration avant de se lancer.

-“ Mon frère Daniel est arrivé chez moi hier soir” commença-t-elle. “ Je ne l’ai pas vu depuis des années.”

-“ Pour quelle raison ? Si ce n’est pas trop indiscret” osa-t-il demander.

-“ Il me reprochait beaucoup de choses et a finit par s‘éloigner” répondit-elle. “ Il était jeune quand ma mère est morte, si jeune. J’ai fais de mon mieux pour l’aider, mais il me reprochait d’être trop protectrice. Quand je lui ai enfin laissé un peu de liberté et que j’ai décidé de penser à moi, il m’a reproché de ne pas penser à lui.”

-“ Tu as fais de ton mieux.”

-“ Je sais. Je sais aussi que Daniel avait de mauvaises fréquentations à cette époque et qu’il n’était plus vraiment lui-même” souffla Lisbon. “ Il ne m’a pas donné de nouvelle pendant des années et hier soir et il est venu me demander de l’aide.”

-“ Il a des problèmes ?” S’inquiéta Jane.

-“ En quelque sorte” répondit l’agent.

-“ Il a prit le même chemin que ton père n’est-ce pas ?” Suggéra Jane. “ Et tu te dis qu’il est de ton devoir de lui venir en aide.”

-“ C’est mon petit frère, je ne peux pas l’abandonner.”

-“ Je ne te demande pas de l’abandonner” la rassura Jane. “ Mais si jamais tu as besoin de quelqu’un pour t’écouter, n’oublie pas que je suis là.”

Lisbon lui sourit, reconnaissante de son soutien. Ça lui avait fait du bien de parler un peu, de partager ses soucis. De plus, Jane était un homme compréhensif et de bons conseils. Elle savait qu’en cas de problèmes, elle pourrait toujours compter sur lui, qu’il ne la laisserait pas tomber.

La serveuse arriva avec leur commande et les deux amis mangèrent en silence. Ils s’étaient tout dit et savaient qu’ils pouvaient compter l’un sur l’autre. Lisbon se rappela d’une époque où elle avait vraiment eut besoin de Jane. Il avait été là, l’avait aidé, sans se poser de questions. Et aujourd’hui encore, il était là. Parmi tout les amis qu’elle avait eut dans sa vie, seuls ses quatre collègues de travail s’étaient montrés les plus loyaux. Et si jamais Daniel avait encore des problèmes, elle savait qu’elle pourrait leur demander de l’aide. Et ce moment arriverait plus tôt qu’elle ne l’imaginait.

Après leur discussion, Jane et Lisbon étaient retournés au CBI où l’agent s’était enfermé dans son bureau tandis que Jane reprenait sa place sur son canapé pour une petite sieste. Personne n’avait rien dit à leur retour, bien qu’ils soient revenus plus tard qu’ils ne leur avaient dit en partant. Ils avaient tous remarqué les changements chez Jane depuis que John le Rouge n’était plus une menace. Il était plus détendu, plus ouvert et plus présent.

Jane avait toujours été là pour Lisbon, s’assurant qu’elle dorme bien, qu’elle mange assez. Mais depuis que le tueur n’était plus dans sa vie, il était encore plus protecteur envers Lisbon. Il lui apportait son café régulièrement, de quoi manger quand elle travaillait tellement qu’elle en oubliait de manger. Il restait avec elle le soir et souvent arrivait avec elle le matin.

Il ne vivait plus dans une chambre de motel, mais dans un appartement. Ça ne s’était pas fait tout de suite, mais seulement au bout de plusieurs mois. Il avait demandé de l’aide à chacun d’eux. Mais il était si difficile qu’ils s’étaient tous lassés. Seule Lisbon avait tenu le coup et l’avait aidé à trouver l’appartement parfait. D’après ce qu’ils savaient, elle l’avait même aidé à faire la décoration, ce qui était étonnant puisqu’ils n’avaient pas les mêmes goûts.

Lisbon avait été là pour lui lorsqu’il en avait eut besoin, mais pas seulement pour lui. Cho avait vu à quel point tous ces changements dans la vie de Jane avaient également affecté l’agent. Lisbon était une femme très sensible, même si elle faisait de son mieux pour ne pas le laissé paraître. Et lorsqu’il était question de Jane, elle n’y parvenait plus. Elle n’avait jamais put cacher son attachement pour son consultant, le fait qu’elle l’ait gardé dans son équipe pendant toutes ces années en était la preuve.

Cette pause déjeuner n’avait donc surprit personne, ni même leur retard. Les sourires sur leurs visages suffisaient à savoir que tout allait bien. Lisbon s’assurait toujours que Jane aille bien et Jane en faisait autant pour elle. Et maintenant, ils reprenaient leurs activités habituelles : remplir des rapports pour Lisbon et faire la sieste pour Jane.

Jane, confortablement installé sur son canapé, repensait à ce que Lisbon lui avait dit lors de leur déjeuner. Son frère, qu’elle n’avait pas vu depuis des années, était de retour dans sa vie et elle était inquiète. D’après ce qu’elle lui avait dit, Daniel avait eut des problèmes par le passé, surtout avec l’alcool. Comme Tommy et James ne voulaient pas l’aider, il s’était tourné vers elle.

Il trouvait que sa présence soudaine dans la vie de l’agent n’était pas seulement dut à son amour pour elle et son envie de se racheter. Si ses frères ne l’avaient pas rejeté, il ne serait jamais venu voir Teresa, de ça Jane en était certain. Ce qui lui fit mal au cœur. Teresa Lisbon était la personne la plus gentille qu’il connaisse, (même s’il savait de source sûre qu’elle était parfaitement capable de faire très mal si on la poussait trop), la plus compatissante et loyale. Pour elle il serait prêt à tout.

Il était heureux que son frère soit de retour dans sa vie, il ne fallait pas croire le contraire. Il savait qu’elle avait toujours été triste du peu de rapports qu’elle avait avec lui, tout comme avec les autres. Elle avait passé des années à s’occuper d’eux, à prendre soin d’eux, comme une mère l’aurait fait. Elle été très attachée à ses trois frères, même s’ils ne se voyaient jamais.

Jane voulait connaître les véritables raisons du retour de Daniel Lisbon. S’il était là uniquement parce qu’il avait des problèmes et avait besoin d’un endroit pour se cacher, alors il lui ferait comprendre sa façon de penser. Il savait que Lisbon n’apprécierait pas, qu’elle lui reprocherait de se mêler de ce qui ne le regardait pas. Par contre, s’il était vraiment là pour sa sœur et se racheter du passé, il ne ferait rien, sauf apprécier le bonheur de Lisbon.

Avec sa nouvelle mission en tête, il réfléchit à un moyen de rencontrer Daniel sans éveiller les soupçons de sa collègue. Il ne voulait pas qu’elle sache quoi que ce soit sur ses intentions. Depuis la mort de son ennemi, il était parvenu à établir une relation de confiance et d’amitié profonde avec la jeune femme. Il ne voulait pas tout perdre maintenant. Elle comptait beaucoup trop pour lui, elle était tout ce qui lui restait dans la vie. Sans elle, il n’aurait plus rien.

Il se redressa sur son canapé lorsqu’il entendit un téléphone sonner et tourna la tête vers le bureau de Lisbon. Elle était au téléphone, fronçant les sourcils comme elle le faisait toujours lorsqu’elle recevait un appel concernant une affaire. Elle prenait des notes consciencieusement, comme elle le faisait toujours, puis elle raccrocha. Il l’observa se lever, prendre ses affaires et se diriger vers l’open space.

-“ On a une affaire !” les informa l’agent senior. “ Un corps à été retrouvé au nord de la ville, dans un entrepôt désaffecté. Van Pelt, restez ici et coordonnez les recherches. Je vous contacterai une fois sur place pour vous donner les informations nécessaires sur la victime. En attendant, je veux que vous cherchiez qui est le propriétaire de l’entrepôt. Les autres, en route.”

Van Pelt se mit immédiatement au travail lorsque Lisbon lui donna l’adresse de l’entrepôt. Lisbon savait que la jeune agent était prête à venir sur le terrain, elle l’était depuis plusieurs années maintenant. Cela faisait plus de sept ans qu’elles travaillaient ensemble, elles avaient confiance l’une en l’autre. Mais Grace était la plus à l’aise avec les ordinateurs, de ce fait, elle restait toujours au bureau.

Les deux autres agents et Jane suivirent Lisbon jusqu’au parking où, comme ils en avaient toujours eut l’habitude, Lisbon monta en voiture avec Jane et les deux autres prirent une seconde voiture. Jane n’avait pas changé, il avait toujours cette habitude de partir de son côté et Lisbon trouvait plus pratique de prendre deux véhicule afin de ne pas pénaliser leurs collègues.

Dans la voiture qui les conduisait à la scène de crime, le silence était total. Jane continuait de réfléchir au moyen de rencontrer Daniel. Il voulait le faire au plus vite afin de s’assurer que ce dernier ne ferait pas de mal à Lisbon. Quand à l’agent, elle pensait à la même personne mais pour une toute autre raison. Elle s’inquiétait toujours pour son frère. Elle avait tenté de le joindre deux fois après sa pause déjeuner, mais il n’avait pas plus répondu.

Avec son passé et ses problèmes, Lisbon craignait qu’il ne replonge. Elle savait à quel point il était difficile de résister à la tentation. Son père avait essayé au début, mais n’y était pas parvenu. Daniel avait prit le même chemin. Elle espérait toutefois qu’il serait plus fort que leur père, qu’il trouverait le courage nécessaire pour ne pas sombrer de nouveau. Et même s’il n’y parvenait pas, elle ne le rejetterait pas, elle l’aiderait de son mieux. Elle l’avait fait avec son père, ça n’avait pas marché. Mais elle gardait de l’espoir pour son petit frère.

-“ Quelque chose te tracasse Lisbon ?” Demanda Jane, rompant le silence devenant pesant. Il avait bien vu l’inquiétude sur le visage de la brune et savait exactement ce qui n’allait pas.

-“ Je m’inquiète simplement pour mon frère” répondit-t-elle. A quoi aurait-il servit de lui mentir ? Il le savait déjà de toute façon.

-“ Il n’a toujours pas répondu au téléphone ?” S’enquit-il.

-“ Toujours pas” avoua Lisbon. “ Il est certainement sortit faire des courses. Je dois bien avouer qu’il n’y a pas grand-chose à manger chez moi.”

-“ Tu n’as jamais rien à manger chez toi” souligna le blond.

-“ Tu t’en plains souvent, mais pourtant ça ne t’empêche pas de venir chez moi et de t’imposer pour le dîner” fit remarquer l’agent avec un sourire.

-“ C’est vrai, mais tu commandes toujours des plats à emporter” répliqua Jane. “ Il serait peut-être temps que tu remédies à ça,” il eut soudain une idée. “ Et si je venais manger ce soir, j’apporterai ce qu’il faut et je cuisinerai.”

Lisbon tourna brièvement la tête vers son collègue avant de reporter son attention sur la route. Un regard et elle sut exactement ce qu’il avait en tête. Elle se doutait, au moment où elle lui avait révélé la présence de son frère, qu’il chercherait un moyen de le rencontrer. Elle ne voulait pas que Jane se mêle de ça, mais elle savait que rien de ce qu’elle pourrait dire ne le ferait abandonner son idée.

-“ Ton idée est tentante” commença-t-elle. “ Ce que je te propose, c’est que si nous ne finissons pas trop tard, tu peux venir et cuisiner pour trois.”

-“ Ça me va” sourit Jane.

-“ C’est réglé alors. Maintenant, on se concentre sur l‘affaire.”

Ils arrivèrent rapidement à l’entrepôt où ils furent accueillit par un officier de police qui s’approcha directement vers Jane. Il avait une sorte de lueur d’admiration dans le regard et le consultant se sentit mal à l’aise. Lisbon, qui avait remarqué l’inconfort de son collègue, passa devant lui pour s’adresser à l’agent.

-“ Je suis l’agent Teresa Lisbon du CBI,” se présenta-t-elle. “ Qu’avons-nous ?”

L’officier se reprit immédiatement et se tourna vers l’agent.

-“ Un homme d’environ quarante ans, type caucasien” expliqua l’homme. “ Nous n’avons pas d’identité pour le moment.”

-“ Cause de la mort ?”

-“ Le médecin légiste dit qu’il ne peut pas se prononcer pour le moment” admit l’officier. “ Il vous fera parvenir son rapport.”

-“ Pourrais-je voir le corps dans ce cas” Lisbon commençait à perdre patience. “ Ou il a déjà été emporté à la morgue.”

-“ Et bien…” hésita l’homme. “ C’est à dire qu’il…”

-“ Il quoi ?” Demanda Lisbon d’une voix sèche, perdant patience. “ Est-il encore là ou dois-je me rendre à la morgue ?”

-“ Il est là mais… Il n’est pas très beau à voir et je… Je ne pense pas que vous devriez voir le corps.”

-“ Et pourrais-je savoir pourquoi ?”

-“ Et bien, il est en assez mauvais état. Enfin je veux dire…”

-“ Et vous craignez que je ne supporte pas la vue du cadavre.” L’homme ne répondit pas. “ Nous avons perdu assez de temps, dites-moi où se trouve le corps que je puisse faire mon travail.”

Un peu plus loin, Cho, Rigsby et Jane regardaient l’échange avec un amusement à peine dissimulé, du moins pour Jane. Les deux agents souriaient, enfin Rigsby souriait. Cho était plus discret, seuls ses yeux montraient à quel point il trouvait la scène amusante. Le jeune officier se sentit soudain mal à l’aise, se rendant enfin compte de la bêtise qu’il venait de dire. Il lança un regard désespéré vers l’équipe du CBI et Jane se décida enfin à mettre un terme au calvaire du pauvre homme. Le mentaliste avança vers Lisbon qui semblait sur le point de faire comprendre ce qu’elle pensait à ce jeune officier.

-“ Pourriez-vous s’il vous plait nous conduire au corps de notre victime ?” Demanda Jane. “ Nous avons un travail à faire, et je dirais que le votre ici est terminé.”

L’homme regarda Jane puis hocha la tête et conduisit l’équipe jusqu’au corps. Il s’éclipsa discrètement lorsque Jane s’agenouilla près du corps et commença à l’observer, puis le renifler. Il avait déjà entendu parler des méthodes du mentaliste, mais n’y avait jamais assisté. Il trouvait ça répugnant et préféra ne pas rester.

Lisbon le regarda s’éloigner avec soulagement. C’était la première fois qu’on remettait en question sa position d’agent senior à cause de sa condition de femme. Elle avait bien envie de lui faire comprendre sa façon de penser, lui faire comprendre que ce n’est pas parce qu’elle était une femme qu’elle était faible et ne supportait pas la vue d’un corps. Mais elle décida qu’il n’en valait pas la peine. Elle avait un travail à faire.

L’agent se tourna, à la recherche du médecin légiste qu’elle trouva un peu plus loin, donnant des ordres à son assistant. Lorsqu’il la vit, il délaissa le jeune homme puis vint à sa rencontre, un sourire bienveillant sur le visage. Il tendit sa main que Lisbon prit avec joie.

-“ C’est un plaisir de vous revoir agent Lisbon, bien que les circonstances ne soient pas les meilleures” dit l’homme.

-“ Je suis également heureuse de vous revoir” affirma Lisbon. “ Que pouvez-vous me dire sur la victime ?”

-“ Pour le moment pas grand-chose” avoua le médecin. “ Il a été battu à mort. Il y a des marques de liens sur ses poignets, il n’a pas put se défendre. Son visage n’en est plus un, mais s’il est fiché, je pourrai vous donner son identité grâce à son ADN. Mais ça risque de prendre un peu de temps. Toutefois, je pourrai peut-être trouver quelque chose avec ses empreintes. S‘il a fait de la prison, je le saurai bien plus vite. Je vous tiendrai au courant dès que j‘aurai les résultats.”

-“ Très bien, merci.” Elle se tourna vers Jane. “ Tu as finis ?”

-“ J’ai vu ce que j’avais à voir” répondit le mentaliste.

-“ Vous pouvez emmener le corps” dit l’agent au médecin.

-“ Je vous ferai envoyer le rapport aussitôt que l’autopsie sera finie.”

-“ Merci.”

Le médecin appela son assistant qui l’aida à placer le corps dans un sac mortuaire puis ils l’installèrent sur une civière pour le transporter jusqu’à leur véhicule. Lisbon se tourna vers son équipe qui n’avait pas attendu ses instructions. Cho et Rigsby étaient déjà au travail, recherchant d’éventuels témoins parmi les hommes qui travaillaient dans les entrepôts alentours. Quelqu’un avait certainement vu quelque chose.

Lisbon se dirigea donc vers Jane pour avoir son avis. Mais l’homme était déjà partit de son côté, comme il le faisait toujours. Il avait certainement vu quelque chose d’intéressant. Elle le retrouva un peu plus loin, dans une autre pièce. Il était en train d’examiner la table au fond de la grande salle sur laquelle était posé un cahier. L’agent s’approcha et regarda par-dessus l’épaule de son collègue.

Jane ouvrit le cahier révélant une liste d’initiales. Il leva la tête et croisa le regard curieux de Lisbon. Il revint ensuite au cahier et continua de tourner les pages. Sur chacune d’elles, en haut à gauche, étaient inscrites deux initiales, le prénom et le nom de quelqu’un. En dessous, il y avait une autre liste, bien plus inquiétante. D’autres initiales, suivit d’une inscription.

-“ Où as-tu trouvé ça ?” Demanda l’agent.

-“ Caché sous un tas de caisses juste là” dit-il indiquant un endroit un peu plus loin sur la droite.

-“ Tu sais de quoi il s’agit ?” S’enquit Lisbon.

-“ Je crois que c’est une liste de noms” répondit Jane. “ Maintenant reste à savoir qui sont ces gens et pourquoi ce livre est toujours ici.”

-“ L’homme est soit un de ceux de la liste, soit un de ceux qui l’ont tué” continua Lisbon. “ Pour le moment on ne peut rien faire si ce n’est découvrir qui ils sont.”

Jane referma le cahier et se tourna vers Lisbon, le regard sérieux.

-“ Lisbon, tous ces gens sont en danger” dit-il. “ Nous devons absolument trouver qui ils sont et au plus vite.”

-“ Nous ne savons pas même pas si c’est le cas” le coupa Lisbon. “ Ça ne veut peut-être rien dire. Mais nous ne prendrons pas de risques. Je vais demander à Van Pelt de faire des recherches. Peut-être qu’en regroupant les initiales avec les listes d’électeurs nous trouverons quelque chose.”

-“ Et pour ceux qui ne s’y trouvent pas ?”

-“ On trouvera un moyen de les identifier et de les protéger” assura l’agent. “ Allez viens, retournons au bureau.”

Lisbon posa la main sur l’épaule de Jane qui ramassa le cahier. Puis, après un dernier regard dans la pièce, ils sortirent pour rejoindre les autres. Cho et Rigsby les attendaient, mais à leur regard, Lisbon sut qu’ils n’avaient rien apprit. Décidément, elle n’aimait pas ce genre d’affaire. Aucune identité pour la victime et une liste d’éventuelles victimes. Elle allait avoir beaucoup de travail.

-“ Jane a trouvé un carnet contenant des initiales” les informa Lisbon. “ Nous retournons au CBI le donner à Van Pelt et voir ce que nous pouvons en tirer. Je veux que vous restiez ici, voyez s’il y a des vidéos de surveillances dans l’un des autres entrepôts.”

-“ On s’en occupe.”

-“ Et lorsque vous aurez fini, vous n’aurez qu’a rentrer chez vous” ajouta-t-elle. “ Il commence à se faire tard. Vous me ferez votre rapport demain matin.”

-“ Bien patron.”

Les deux agents s’éloignèrent et retournèrent voir les autres entrepôts qu’ils venaient juste de quitter. Cho avait remarqué que l’entrepôt le plus près était équipé de cameras à l’entrée. L’angle permettait de voir le côté sud de l’entrepôt où le corps avait été retrouvé. Si ces gens étaient arrivés par là, ils pourraient les voir. Restait juste à espérer qu’ils ne soient pas passés par l’autre porte.


   


Lisbon et Jane remontèrent en voiture et se rendirent au CBI. A côté d’elle, Jane était silencieux, le carnet toujours entre les mains. Il n’avait cessait de le feuilleter, en se disant que peut-être certains initiales lui seraient familières. Mais jusque là rien. Il n’aimait pas ne pas savoir. Il avait été habitué à résoudre des casses têtes de ce genre sans difficulté grâce à sa mémoire. Malheureusement, ces derniers temps il avait assez de mal. Sa mémoire lui jouait des tours et il avait le sentiment que ce n’était pas vraiment le bon moment.

En règle générale, Lisbon était celle avec de l’intuition. Lui, il travaillait avec sa mémoire et ses idées. Ils se complétaient parfaitement, ils étaient une excellente équipe. Mais là, il ne trouvait rien. Il jeta un regard à Lisbon qui avait les yeux sur la route. Elle semblait inquiète, et il savait que ce n’était pas à cause de l’enquête. Elle s’inquiétait pour son frère et il la comprenait.

Il se souvint de leur accord pour la soirée à venir. Il y avait pensé depuis qu’elle avait accepté, impatient d’y être. Mais maintenant il n’en était plus aussi sûr. Il ne voulait pas la mettre mal à l’aise, ce qu’il savait inévitable s’il se retrouvait dans la même pièce que Teresa et son frère. Il poserait certainement des questions embarrassantes, comme il le faisait toujours.
De plus, cette nouvelle affaire avait piqué sa curiosité. Ne parvenant pas à trouver la signification de ces initiales, il était certain qu’il y passerait la nuit. Il devrait donc décommander leur soirée, ce qui soulagerait certainement Lisbon.

Ils arrivèrent rapidement au CBI et le duo monta à leur étage où les attendait Van Pelt. La jeune agent leva les yeux à leur approche, semblant attendre quelque chose à faire. Jane remarqua qu’elle ne travaillait pas sur son ordinateur, ce qui voulait dire qu’elle n’avait certainement rien trouvé sur ce que lui avait demandé Lisbon.

-“ Van Pelt, nous avons trouvé un carnet” expliqua Lisbon en arrivant à hauteur de sa collègue. “ Il y a une liste d’initiales que je voudrais que vous décodiez, si vous y arrivez.”

-“ Je m’en occupe patron” dit la jeune femme en tendant la main vers Jane pour prendre le carnet, mais l’homme ne le lui donna pas. “ Jane ?”

-“ Je crois que je vais t’aider Grace” lui dit-il, et devant le regard curieux et un peu déçu de Lisbon, il ajouta: “ C’est un travail long et fastidieux, il vaut mieux être deux pour ça.”

Lisbon ne dit rien et se dirigea vers son bureau, laissant ses deux collègues derrière elle. Jane la regarda s’éloigner, son cœur se serrant un peu à l’idée de l’avoir déçue. Mais il avait besoin de comprendre ce que voulaient dire toutes ces initiales. Il avait le sentiment que quelque chose d’important et grave allait se produire et que seul la résolution de ce mystère pouvait l’empêcher. Il n’aimait pas que quelque chose lui résiste et cette liste ne lui résisterait pas.

-“ Tu peux commencer à regarder pendant que je vais voir Lisbon ?” Demanda-t-il à l’agent qui acquiesça avec un sourire. “ Je n’en ai pas pour longtemps.”

Puis il s’éloigna pour rejoindre sa collègue. Lorsqu’il ouvrit la porte, il la trouva assise derrière son bureau, son téléphone collé à l’oreille, en pleine conversation. Elle leva les yeux vers lui puis leva un doigt devant elle pour lui signaler de se taire. Il hocha la tête et s’apprêtait à partir quand elle lui fit comprendre de s’installer sur le canapé le temps qu’elle finisse.

Il s’exécuta, tentant de ne pas écouter ce qu’elle disait. Il reporta son esprit sur l’affaire en cours, ce qui lui permit de s’occuper assez pour ne pas entendre un mot de ce que disait Lisbon. Mais il entendit tout de même un nom qui le fit sourire. Daniel. Lisbon était enfin parvenue à joindre son frère et un coup d’œil à son visage lui permit d’y voir du soulagement. Il lui fit un petit sourire qu’elle lui rendit.

-“ Très bien, je te vois ce soir alors” dit-elle à Daniel, puis elle raccrocha. “ Mon frère était sortit acheter de quoi remplir mon frigo et mes placards” expliqua-t-elle.

-“ Excellente idée” approuva Jane. “ Et je suis désolé de décommander ce soir, mais j’ai l’intime conviction que cette liste est d’une importance capitale.”

-“ Tu n’a pas à t’excuser, l’affaire passe en premier” le rassura Lisbon. “ Je crois même que je devrais rester, une troisième personne serait un plus pour résoudre cette énigme.”

-“ Inutile Lisbon. Nous y arriverons très bien sans toi, pas que tu ne puisses pas nous aider. Mais ton frère est chez toi, tu ne l’as pas vu depuis des années” expliqua-t-il. “ Tu devrais profiter de sa présence.”

-“ Mais je suis la chef de cette équipe, il est donc normal que je reste et que j’aide.”

-“ Pas cette fois Lisbon,” Jane se leva du canapé et s’approcha de Lisbon, s’asseyant sur le rebord du bureau. Il posa ses mains sur les épaules de l’agent. “ Ecoute moi Lisbon, tu travailles beaucoup trop pour ton bien. Pour une fois, laisse le reste de ton équipe s’occuper de tout et profite d’une soirée tranquille. Et si tu veux, tu n’auras qu’à venir plus tôt demain matin et rester tard demain soir.”

Lisbon ne put s’empêcher de rire et Jane la rejoignit.

-“ Très bien, je vous laisse travailler entre vous” capitula-t-elle. “ Mais si tu trouves la moindre chose, tu m’appelles. Qu’importe l’heure.”

-“ C’est promis Lisbon” promis Jane. “ Et toi promets moi de profiter de ta soirée avec ton frère et de ne pas penser au travail.”

Lisbon lui envoya un regard qui lui fit comprendre qu’elle ferait de son mieux. Mais il la connaissait, il savait qu’elle ne profiterait pas vraiment de sa soirée, que cette affaire lui tournerait dans la tête jusqu’à ce que soit de retour le lendemain. Il ne pouvait pas la blâmer, son travail était sa vie.

-“ Je vais retourner auprès de Grace” dit alors Jane.

-“ D‘accord. Mais surtout appelle moi si jamais vous trouvez quelque chose” lui rappela-t-elle et Jane hocha la tête en réponse.


 


Un peu plus tard dans la soirée, Lisbon arriva chez elle avec un poids dans le ventre. Elle n’avait pas réussit à joindre son frère avant son départ du CBI. Elle voulait faire confiance à son frère, elle voulait croire qu’il ne ferait rien de répréhensible. Mais c’était plus fort qu’elle. En passant la porte, Lisbon constata le silence de l’appartement. Elle posa ses affaires avant de faire le tour de chaque pièce à la recherche de Daniel. Mais il n’y avait aucune trace de lui, nulle part.

L’agent retourna dans le salon et se laissa tomber sur le canapé. Elle regrettait de ne pas être restée au bureau pour aider Jane et Van Pelt à résoudre l’énigme du carnet. A trois ils seraient allés bien plus vite, elle n’en doutait pas. Jane avait voulut être gentil en lui proposant de rentrer chez elle et de profiter de la présence de son frère. Malheureusement il n’était pas là, elle se retrouvait donc seule.

Elle eut envie de les rejoindre et de se rendre utile et s’apprêtait à le faire lorsque la porte de l’appartement s’ouvrit, révélant Daniel. Il titubait, ses cheveux étaient en désordre, ses vêtements sales. Lisbon sentit une profonde déception l’envahir mais elle se reprit rapidement pour aller l’aider à marcher.

-“ Daniel, où étais-tu ?” Questionna-t-elle en l’installant sur le canapé.

-“ Des copains” articula avec difficulté le jeune homme tout en se laissant tomber sur le canapé, les yeux clos.

-“ Tu sens l’alcool à plein nez Daniel” fit remarquer Lisbon. “ Tu avais dis que tu ne boirais plus.”

-“ Juste un verre” bégaya-t-il.

-“ Oui, et un autre ensuite, comme papa” rappela-t-elle.

-“ Pas comme papa” répondit Daniel en ouvrant les yeux. “ Jamais comme papa.”

Lisbon regarda son frère tenter de se lever avant de retomber lourdement sur le canapé, puis se leva pour aller lui préparer quelque chose à boire et à manger. Elle le laisserait dormir sur le canapé ce soir. De toute façon, il était bien trop lourd pour qu’elle puisse le faire monter jusqu’à sa chambre. Il risquait de dormir toute la soirée et toute la nuit, la laissant seule.
Alors décida qu’il ne lui servait donc à rien de rester chez elle. Ses collègues avaient beaucoup de travail et elle voulait se rendre utile. Alors elle se dépêcha de préparer un sandwich à son frère qu’elle déposa sur la table basse, avec un verre d’eau et un comprimé d’aspirine. Daniel en aurait bien besoin lorsqu’il s’éveillerait avec la gueule de bois.

Lisbon passa une main sur le visage endormit de son frère, se pencha et lui embrassa le front avec délicatesse. Elle se redressa, puis attrapa sa veste et ses clés avant de marcher jusqu’à la porte. Elle lui jeta un dernier regard avant d’ouvrir la porte et de sortir.


 


Cela faisait plusieurs heures que Jane et Van Pelt travaillaient sur le carnet. Ils n’avaient encore rien trouvé. Ils étaient d’accord sur le fait qu’il s’agissait d’une liste de nom. Ils ne savaient toujours pas si l’homme qu’il avait trouvé était sur cette liste ou non, mais le médecin légiste leur avait dit qu’ils auraient des nouvelles dans la matinée. En attendant, ils devaient se contenter du peu qu’ils avaient, ce qui était déjà bien assez.

Van Pelt avait tenté de comparer les initiales avec les listes d’électeurs de Sacramento, mais comme elle n’avait rien trouvé, elle avait tenté dans tout l’Etat de Californie. Elle n’avait pas eut beaucoup de chance pour le moment. Personne ne semblait correspondre à cette liste.

-“ Tu devrais étendre les recherches à tout le pays” suggéra Jane. “ Peut-être aurons-nous plus de chance.”

-“ Je vais essayer” acquiesça la rousse en se mettant au travail. Et elle n’eut pas à attendre longtemps car aussitôt, une liste de nom apparut sur son écran. “ Tu avais raison Jane.”

Le mentaliste se leva de son canapé pour venir se placer derrière l’agent, regardant l’ordinateur par-dessus son épaule. En effet, il avait raison. Une liste de personne apparut sur l’écran, des personnes assassinés dont le coupable n’avait pas encore été retrouvé. La police n’avait pas fait le lien entre tous les meurtres, les victimes n’étant pas toutes dans le même Etat.

-“ Je n’imaginais pas trouver ça” souffla Grace. “ Il y a pour le moment douze victimes qui correspondent à la liste du carnet.”

-“ Des familles” fit remarquer Jane qui sentit la colère monter en lui. “ Ils s’en prennent à des familles. Ils tuent des enfants. Mais pourquoi ?”

-“ La plus jeune victime avait six ans, un petit garçon, Joshua Parker” lut Van Pelt. “ Sa mère, Anna, son père, Gilbert, ses deux sœurs, Sophia et Jessica et son frère aîné Andrew, ont tous été tués.”

-“ De quelle façon ?” Se força à demander Jane.

-“ Les parents ont été battus à mort. Les filles et le petit garçon sont morts assez rapidement d’après le rapport du médecin légiste.” Grace pianota sur le clavier puis reprit: “ C’est à peu près la même chose pour toutes les victimes. Il y a deux autres familles dont les initiales se trouvent dans le carnet.”

-“ Nous avons au moins trois familles d’identifiées” dit Jane. “ Il va falloir identifier les autres. Et si tu n’as rien trouvé c’est qu’ils sont encore en vie, pour le moment.”

-“ Il va falloir les trouver et les mettre sous protection” précisa l’agent. “ On devrait avertir Lisbon.”

Et juste lorsque les mots sortaient de sa bouche, le bruit de l’ascenseur attira son attention et elle vit sa patronne arriver. Jane se tourna et fut également très surprit de la voir. Un regard et il comprit qu’elle lui parlerait plus tard mais que pour le moment elle voulait se concentrer sur l’affaire.

-“ Patron, nous avons trouvé quelque chose” informa Grace.

-“ Je t’écoute” dit Lisbon en s’approchant.

-“ La liste d’initiales dans le carnet est bien une liste de nom” expliqua Van Pelt. “ Pour le moment, nous avons identifié trois familles, toutes les trois mortes. Une à New-York et deux à Chicago.”

-“ Et pour notre victime ?” S’enquit Lisbon.

-“ Rien pour le moment” répondit la rousse. “ Je pense que nous en saurons plus demain dans la matinée.”

-“ Très bien, et pour les vidéos surveillances de l’entrepôt ?”

-“ Cho est passé pour les déposer et il les a visionnées avant de partir. Mais il n’a rien trouvé qui puisse nous aider.”

-“ Il va donc falloir attendre d’avoir l’identité de notre victime dans ce cas. Bien, je vais dans mon bureau. Van Pelt, tu peux rentrer chez toi, il est tard.”

-“ Bien patron, bonne soirée.”

Lisbon s’éloigna tandis que Van Pelt rassemblait ses affaires. Jane quand à lui, se réinstalla sur son canapé, le carnet entre les mains. Il avait le cœur serré en pensant à ces pauvres enfants, morts pour une raison qu’il ignorait encore. Qui pouvait être aussi cruel pour tuer des enfants innocents ? Ils avaient toute la vie devant eux, et maintenant plus rien. Il trouverait qui leur avait fait ça et les feraient payer. Les assassins ne resteraient pas impunis pour un tel crime.

Mais comme il ne pouvait rien faire de plus pour le moment, il décida de penser à autre chose et il tourna instinctivement les yeux vers le bureau de Lisbon. Sa collègue avait fermé les stores, l’empêchant ainsi de voir dans la pièce. Elle ne voulait voir personne, mais Jane savait que s’il entrait dans son bureau, elle ne le renverrait pas. Mais pour ne pas prendre de risque, il décida d’aller la voir avec une tasse de café, même s’il se faisait un peu tard pour ça.

Il se leva et se dirigea vers la petite cuisine où il prépara le café de Lisbon ainsi qu’un thé pour lui-même. Il n’y avait pas d’heure pour le thé et il ne laisserait pas Lisbon boire seule. Une fois le tout prêt, il attrapa un paquet de petit gâteau qu’il glissa sous son bras avant de se rendre au bureau de Lisbon. Et comme si elle savait qu’il arrivait, elle ouvrit la porte.

-“ Jane, tu m’as l’air bien chargé” sourit-elle en prenant le paquet de biscuit et de lui tenir la porte.

-“ C’est bien gentil Lisbon” remercia Jane en posant les tasses sur le bureau de Lisbon. “ Je me suis dis qu’un café te ferait le plus grand bien.”

-“ Et je t’en remercie.”

Le silence s’imposa alors que les deux s’installaient sur le canapé blanc que Jane avait offert à Lisbon tant d’années plus tôt, chacun une tasse à la main. Lisbon savait ce que Jane voulait et ce dernier attendait que Lisbon se décide à parler. Il ne la pousserait pas, il savait qu’elle le ferait quand elle serait prête. Ce qui ne tarda pas. Lorsqu’elle posa la tasse devant elle sur la petite table, il sut qu’elle était prête à lui parler.

Il posa également sa tasse sur la table avant de s’installer confortablement sur le canapé. Lisbon avait croisé ses mains sur ses jambes, comme elle le faisait si souvent ces derniers temps. Il l’avait remarqué pour la première fois un peu plus d’un an plus tôt et elle le faisait toujours lorsqu’elle était soucieuse. Il ne savait pas d’où elle avait prit cette habitude, mais au moins cela l’informait de son humeur.

-“ Mon frère est rentré à la maison tard” commença-t-elle. “ Il est sortit toute la journée, c’est pour ça que je ne pouvais pas le joindre.”

-“ Il y a autre chose” dit Jane, conscient que Lisbon ne lui disait pas tout.

-“ Je pensais pouvoir avoir confiance en lui, mais j’ai eus tort.”

-“ Il avait but” remarqua Jane en se tournant vers Lisbon et en posant sa main sur son avant bras. “ Mais tu ne devrais pas le condamner.”

-“ Je ne le fais pas, c’est juste que…”

-“ C’est comme revoir ton père” finit Jane à sa place.

Lisbon tourna les yeux vers Jane, peu surprise de sa constatation. Il la connaissait si bien, les mots étaient presque inutiles entre eux. Il avait deviné ce qui lui avait traversé l’esprit en voyant son frère avachi sur le canapé. Elle avait eut l’impression de voir son père après la mort de sa mère.

Jane serra son bras, ce qui attira son attention. Elle leva une fois de plus les yeux vers lui et sourit. Sa simple présence était réconfortante, apaisante. Après tant d’années à travailler ensemble, tant d’années à lui reprocher sa masse de rapports et de plaintes, Lisbon avait finit par apprécier sa présence. Elle s’était rendue compte que Jane était d’agréable compagnie, lorsqu’il se permettait d’être lui-même.

-“ Il a besoin d’aide et de soutien” reprit Jane. “ Et je peux l’aider si tu veux bien.”

-“ Je ne sais pas. Je n’aime pas mélanger ma vie privée et ma vie professionnelle” rappela l’agent.

-“ C’est ta décision” approuva Jane, comprenant la réticence de sa collègue. “ Mais mon offre tiendra toujours. Si jamais tu changes d’avis, je serais là.”

Lisbon hocha la tête de gratitude.

-“ Tu devrais rentrer chez toi, je suis certain que ton frère t’attend.”

-“ Oh, il doit encore dormir sur le canapé” répondit Lisbon. “ Quand je suis partis il ronflait.”

Jane sourit à la description que Lisbon faisait de son frère. Il n’avait pas de mal à imaginer le jeune homme, complètement soul, endormi sur le canapé. Il avait lui-même bien souvent vu son père dans un tel état après ses soirées de poker où il perdait toujours tout leur argent. Il ne pouvait que comprendre la peine de Lisbon à savoir son frère emprunter la même route. La seule chose à faire était d’être présent pour Daniel, lui montrer qu’il pouvait retrouver le droit chemin.

Jane se leva du canapé, ramassa les deux tasses encore pleines et les ramena à la cuisine. Il revint ensuite dans le bureau de Lisbon, l’aida à enfiler sa veste et, d’une main dans le bas de son dos, l’accompagna jusqu’à l’ascenseur. Il resta avec elle jusqu’à sa voiture. Seulement là il décida de rentrer chez lui. Il se pencha vers Lisbon pour lui embrasser la joue, ce qui la surprit un peu.

Jane et elle étaient devenus très proches ces dernières années. Ils se prenaient la main lorsque l’autre avait besoin de réconfort, ils se prenaient parfois dans les bras. Mais jamais encore il ne l’avait embrassé ainsi, jamais il n’avait eut le courage de le faire. C’était un geste bien trop intime, surtout pour eux.

Mais Lisbon, bien que surprise, passa un bras dans le dos de Jane et posa son autre main sur sa joue. Elle ferma les yeux, savourant ce simple contact de quelques secondes avant de laisser Jane s’écarter. Elle garda sa main sur la joue de l’homme, la caressant tendrement avant d’elle aussi lui embrasser la joue. Lorsqu’elle s’écarta finalement, Jane avait les yeux clos et elle sourit.

-“ Bonne nuit Jane,” lui souffla-t-elle avant de monter dans sa voiture.

Elle lui fit un signe de la main, puis démarra et s’éloigna, quittant le parking pour rentrer chez elle. Jane resta un moment sur le parking, immobile. Il laissa ses yeux se perdre dans le lointain pendant quelques minutes, se demandant ce qui lui avait prit d’agir ainsi. Lisbon était une amie, sa meilleure amie. Ils avaient vécu tant de choses ensemble au cour des années.

Mais jamais encore il n’avait vu Lisbon comme autre chose que son amie. Pourtant, après la mort de l’homme qui avait brisé sa vie, il se sentait enfin capable d’avancer dans la vie, de se reconstruire. Il avait enfin emménagé dans un appartement, laissant derrière lui sa chambre de motel et son grenier. Il avait changé sa façon de s’habiller, il était plus classique à présent. Et tout ça était grâce à Lisbon. C’était peut-être la raison pour laquelle il se sentait plus proche d’elle que de quiconque. Et la voir si triste et déçue ce soir lui avait fait mal.

Lisbon n’avait pas encore accepté son offre de l’aider avec son frère, mais il savait que ça viendrait. Lisbon avait confiance en lui, plus maintenant que pendant toutes ces années à travailler ensemble. La preuve étant qu’elle partageait avec lui bien plus qu’elle ne l’avait fait avec quiconque. Et pour sa part, il lui confierait sa vie sans hésitation.

Après encore quelques minutes de réflexions, Jane se dirigea vers sa voiture et prit la direction de son appartement. Une longue journée l’attendait demain et il savait que cette enquête allait leur demander beaucoup d’efforts. Son mauvais pressentiment se faisait de plus en plus fort et ce qui l’inquiétait le plus était de ne pas savoir de quoi il s’agissait. Mais il trouverait, il trouvait toujours.


   


Jack faisait les cent pas dans le salon. Il avait cherché pendant des jours, des semaines même. Il n’avait pas eut de chance et il n’aimait pas ça. Dès le début il avait sut que ce n’était pas une bonne idée de faire confiance à cet homme, qu’il ne lui apporterait que des problèmes. Mais Cathy l’avait presque supplié de lui donner une chance, qu’il ne le regretterait pas. Le problème c’est qu’il risquait de tout perdre par la faute de cet homme.

La porte de l’appartement s’ouvrit, laissant entrer trois hommes dont deux restèrent à l’entrée tandis que le troisième s’approchait de Jack.

-“ Alors Charlie ?” S’enquit Jack.

-“ Nous avons trouvé Malone et Johnston” répondit l’homme. “ Sébastien et Max sont partit s’en occuper.”

-“ Et pour Lisbon ?”

-“ Rien pour le moment” avoua l’homme. “ Mais nous le trouverons rapidement. J’ai envoyé Tim voir s’il ne se serait pas réfugié chez ses frères. Il devrait m’appeler sous peu.”

-“ Il a aussi une sœur” fit remarquer Jack. “ Elle vit en Californie, j’y ai envoyé Stanley et les autres. J’attends encore de leurs nouvelles.”

Jack s’éloigna vers le bar où il se servit un verre. Stanley ne l’avait pas encore appelé, mais avec le décalage horaire, il le ferait peut-être plus tard. Pour le moment, il se félicitait d’avoir réduit au silence Malone, Johnston et Parker. Quel dommage que leur famille aient dut payer le prix de leur incompétence. Il n’aimait pas s’en prendre aux enfants, ils étaient innocents. Mais dans cette affaire, il n’y avait pas d’autre solution. Ne restait plus qu’a trouver les autres et en particulier Lisbon. Sans lui, les autres ne se seraient jamais retournés contre lui. Il devait à présent payer.


-“ Nous le retrouverons Jack” assura Charlie.

-“ Oh oui nous le retrouverons” assura Jack. “ Et si nous n’y parvenons pas, sa sœur nous y aidera, qu’elle le veuille ou non.

Et il le pensait. S’il devait utiliser cette femme pour arriver à ses fins, alors il le ferait.